Avignon 2024: « À la recherche de la recherche » . par F. Duplex

 

 

 

 

Théâtre de l’oriflamme.  Avignon,  jusqu’au 21 juillet. 

Cie Teknaï. I

 

Dr Françoise DUPLEX

75014 paris

 

« À la recherche de la recherche » .

Écrit et joué par Jean Jacques Vanier 

À  la recherche de la recherche est un spectacle brillantissime

Formidable Jean-Jacques Vannier, que je suis depuis une trentaine d’années. Son style inchangé reste efficace et unique. Son personnage fait fonctionner la répétition. Sa voix forte et ferme captive dès l’entrée en scène le public qu’il semble hypnotiser par son regard bleu perçant, très fixe voire sévère. Il se présente sous le style du ratage, du gars naïf qui se bute aux écueils de la vie comme si ils étaient placés sur son chemin, rien que le sien, tiens donc?

D’emblée il introduit la notion de manque, d’incomplétude. À partir d’échecs qu’il feint de subir, telle une victime d’un mauvais sort, il saisit un détail de la vie quotidienne qu’il va amplifier, gonfler jusqu’à l’absurde, déclenchant immanquablement les rires, qui -ce me semble, sont volontiers féminins, (remarque qui n’engage que moi) ,s’en suit un déroulé de situations burlesques qui confine au délire faisant appel à l’imaginaire visuel, tout cela exprimé avec un ultime sérieux de la part du personnage naïf entêté. Le texte est ponctué d’un petit riff, qui consiste à réintroduire régulièrement la même image comique, hors de son contexte d’origine ce qui ôte toute gravité, tout sérieux de manière très efficace. Ainsi agit-il avec le texte proustien de « La recherche du temps perdu »,  dont les sept tomes éditions folio l’accompagnent. Les marques d’usures de certains indiquent qu’ils ont bien travaillé. La rencontre Proust- Gaston Gallimard se transforme en une querelle de gamins qui comptent les points.

Notre personnage est un grand immature dans le fond. Chercher l’enfant qui sommeille en vous. le spectacle touche à sa fin, et, d’une façon inhabituelle, l’auteur du one-man-show devient récitant, son jeu l’égard de la salle captivée se modifie, on ne tarde pas à comprendre que cette fois, d’une façon authentique, le comédien récite le très long passage où il question du tout petit bout de madeleine trempé dans un peu d’infusion, qui a le pouvoir de faire surgir un souvenir gustatif totalement enfoui. À ce moment il n’est question que de la beauté du texte, qui vient titiller la jouissance née de la pulsion invoquante. Quel talent! Ajoutons que le burlesque s’appuie sur un texte riche en vocabulaire à la syntaxe choisie, une composition française de bonne facture qui mérite un 20/20 (allusion au spectacle) . 

 

Théâtre de l’oriflamme.  Avignon,  jusqu’au 21 juillet. 

Cie Teknaï. I