Mai 68 : Sommaire

Comments (1)

Avant de me lancer en médecine puis en psychiatrie et de devenir analyste membre de l'ECF , j'étais en fac de Droit . C'est là où "j'ai pris les armes" . J'en souris encore en me revoyant dans la "fac de Droit occupée" , où en pleine nuit j'étais toute seule à "occuper" les lieux qui paraissaient de l'extérieur monstrueusement barricadés . Il eût suffit en réalité de 2 types moyennement baraqués pour parvenir à m'en extirper sans que je puisse y faire grand obstacle ... Mais personne ne l'a osé . Et à moi seule j'ai gardé les lieux . C'était la force des mots , le pouvoir des proclamations de principes et la force de leur sincérité .
Nous, ce qui nous avait mis en colère , mais très en colère , avant toute chose , c'est que la police ait pu entrer à l'université , à la Sorbonne , lieu sacré et inviolable si il en est , où le pouvoir n'avait pas à entrer , au nom du sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs . Depuis le Moyen-âge l'université bénéficiait de cette inviolabilité absolue . Et aucun pouvoir n'avait osé le transgresser , sauf en 1968 à Paris , à la Sorbonne pour y cueillir des étudiants ou pas qui s'y étaient réfugiés .
Je le note car aujourd'hui nous avons la corde moins sensible à l'effraction du pouvoir dans les lieux du savoir !.
La police investit à nouveau les facs , ça ne fait plus ni chaud ni froid à personne ! Pourtant c'est un risque majeur pour les libertés de la pensée . Ce n'est pas si vieux qu'on aille exécuter des gens en raison de leur liberté de penser .... Seul un Copernic a pu en réchapper , ni Galilée , ni même Lacan ...
Mais la théorie du "vivre ensemble" ,le fantasme de l'harmonie universelle mère de toutes les violences , celle analytique de l'amour de transfert pour les pères des nations , et par dessus tout l'application des thérapies de groupes à grande échelle , merci Charlie , a anesthésié notre méfiance légitime née de la Révolution à l'encontre de tout pouvoir qui n'a qu'un but : empêcher les citoyens de penser et d'exercer leur liberté . Aucun pouvoir ne veut notre bien . Ce fut bien là l'erreur commise par les régimes soviétiques voulant notre bien et qui fit tant de mal . Le pouvoir ne veut pas notre bien , il ne veut que le sien : un pouvoir sans limites car il déteste les limites . Il y a 4 pouvoirs : l'exécutif , le législatif , le judiciaire et le peuple , le citoyen , au nom de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme .
Et s'agissant de la psychanalyse , la psychanalyse qui relève de la science , comme l'a inscrite Freud , ne peut ni survivre ni prospérer dans un pays qui rabat la loi législative sur la loi scientifique , prétendant de surcroît l'y contraindre . C'est la mort de l'esprit et la fin du siècle des lumières .
Monique Morel-Vagner