Avis relatif aux risques associés à la pratique du packing pour les patients mineurs atteints de troubles envahissants du développement sévères

2 février 2010

La direction générale de la santé a saisi la Commission spécialisée Sécurité des patients du Haut

Conseil de la santé publique le 30 juin 2009 au sujet des risques éventuels liés à l’utilisation de

la technique du packing dans le traitement de certains troubles graves du comportement,

notamment chez les enfants autistes. Afin de ne pas interférer avec les travaux de recherche

financés dans le cadre d’un PHRC et ceux de la Haute Autorité de santé sur les indications de

cette technique, la commission a proposé de donner un avis sur les points suivants :

• Nature et niveaux d’exposition aux risques physiques et psychologiques connus à ce jour.

• Conditions de sécurité de la réalisation des enveloppements humides.

Cet avis concerne la méthode de packing principalement utilisée en France, celle des

enveloppements humides appliquée aux patients mineurs atteints de troubles envahissants du

développement sévères. Il ne porte pas sur les indications de la technique et n’abordera pas les

aspects éthiques, notamment la notion de maltraitance citée dans le courrier de saisine.

Contexte

Le packing est une technique très ancienne réhabilitée dans les années 70 auprès de patients

schizophrènes, adaptée ensuite, à partir des années 80, aux enfants autistes.

Le packing est un enveloppement serré, humide (le plus souvent froid) suivi d’un réchauffement,

réalisé avec des draps et des couvertures au cours de séances répétées durant chacune

quarante-cinq minutes. Chaque séance est réalisée par une équipe pluridisciplinaire de deux à

quatre professionnels de santé. Un traitement consiste en une à plusieurs séances par semaine

pendant plusieurs semaines.

Selon les experts interrogés, le packing est une technique à médiation corporelle utilisée en

traitement adjuvant intégré dans une approche multidimensionnelle thérapeutique, éducative et

pédagogique. Il ne s’agit pas d’un traitement psychanalytique. Il doit être associé à d’autres

méthodes complémentaires dans la prise en charge des traitements de l'autisme.

Des travaux préliminaires en recherche neurophysiologique soulèvent des hypothèses

intéressantes sur les mécanismes d’action potentiels de cette pratique mais rien n’est établi.

C’est une pratique rare, généralement réservée à des cas gravissimes, le plus souvent en dernier

recours en cas d’auto ou hétéro-agressivité, d’agitation extrême ou de catatonie.

Nature et niveaux d’exposition aux risques physiques et psychologiques connus à

ce jour

L’absence de collecte systématique d’information sur les risques n’a pas permis de définir des

niveaux d’exposition.

• Nature des risques somatiques liés à l’application de la technique

Aucun incident somatique n’est rapporté dans le cadre du packing pratiqué selon les modalités

décrites dans le rapport annexé, ni par les personnes interrogées, ni dans la littérature.

L'analyse objective de la procédure de pack par les membres de la commission n'a pas permis

non plus de mettre en évidence un facteur de risque somatique majeur, corroborant ainsi

l'absence d'incident ou d'accident rapporté. Parmi les risques somatiques qui pouvaient être

évoqués, celui lié à l’hypothermie centrale (troubles du rythme cardiaque, hémorragies ou

infections) peut être raisonnablement exclu si la technique est réalisée selon ces modalités. Un

syndrome de Raynaud lié à la vasoconstriction des shunts artérioveineux au niveau des

extrémités (doigts, orteils) peut apparaître ; c’est un phénomène transitoire qui disparaît au bout

de quelques minutes après réchauffement.

En termes de risque physique, seul le fait de passer à côté d’une comorbidité (comme une

maladie physique douloureuse à l’origine d’auto ou d’hétéro-agressivité, une maladie comitiale)

ou d’un trouble psychiatrique sous-jacent (hallucination) pourrait avoir des répercussions

éventuelles. La réalisation de consultations somatique et psychiatrique préalables doit permettre

de limiter ces risques.

• Nature des risques psychologiques liés à l’application de la technique

Pour l’enfant, le premier risque est la crise d’angoisse ou l’attaque de panique au moment de la

séance. Certains enfants peuvent ressentir, surtout en début de traitement, des angoisses dites

« d’étouffement », véritablement claustrophobiques. L’observation du tonus, du regard, du

comportement, la prise de pouls, doit permettre de les déceler.

Le second risque, en particulier avec les adolescents, est le risque d’érotisation. Eveillant chez

l’enfant des émotions qui seraient désorganisatrices et difficiles pour lui à contrôler, il

entraînerait un état d’excitation plutôt que de sédation. Une certaine réserve s’impose donc dans

les contacts corporels et au respect de la pudeur.

La question du stress lié à une surstimulation reste posée. Des travaux de recherche sont

nécessaires pour établir dans quelle mesure ce risque est fondé. Les conditions favorisant le

stress doivent être réduites au maximum, en limitant les stimulations sonores et visuelles dans

un environnement calme et rassurant.

• Effets indésirables liés à une mauvaise réalisation de la technique

Les experts ont tenu à souligner l’existence de dangers résultant, non de la technique elle-même,

mais de défauts dans sa réalisation, comme la banalisation et la pérennisation de la technique

sans remise en cause de l’indication, l’absence d’intégration dans le programme général de soins

avec incompréhension et rejet par le reste de l’équipe et le sentiment de discontinuité et

d’abandon à la fin de la série de séances.

Conditions de bonne réalisation des enveloppements humides

• Préalablement au traitement, le Haut Conseil de la santé publique recommande :

- une prescription médicale après discussion collégiale de l'équipe en charge du

patient. Le packing est toujours inséré dans un projet thérapeutique ;

- une consultation somatique et une consultation psychiatrique pour éliminer des

comorbidités ou des diagnostics différentiels ;

- l’obtention d’un consentement éclairé et signé des parents à l’aide d’un

document de présentation de la technique. Sollicitation de l’avis de l’enfant dans

la mesure de ses capacités ;

- la mise à disposition des professionnels d’un protocole décrivant les modalités

techniques de réalisation du packing, tout en préservant la possibilité

d'adaptation de certains paramètres en fonction du contexte clinique.

• Pendant la totalité du traitement, le Haut Conseil de la santé publique recommande :

- l’existence d’une équipe de professionnels dédiée stable, ayant reçu une

formation et multidisciplinaire de deux à quatre professionnels ;

- la désignation d’un professionnel référent au sein de cette équipe pour assurer la

continuité pendant toute la durée du traitement ;

- la fonction des professionnels : psychomotriciens, infirmiers, éducateurs,

psychologues, médecins ;

- une pièce dédiée et calme ;

- un protocole adapté en permanence à la réaction de l’enfant et peut être

interrompu ;

- la durée du traitement est de quelques semaines à plusieurs mois : il est

souhaitable qu’elle soit fixée à l’avance (nombre de séances et rythme des

séances), avec une clause de reconsidération prévue en fonction du contexte

clinique. Arrêt progressif des séances avec un encadrement relationnel prévu au

moment de l’arrêt ;

- des débriefings réguliers des séances avec l’ensemble de l’équipe de soins ;

- une supervision de l’équipe de professionnels dédiée au packing avec rapport

écrit.

• Pendant chaque séance, le Haut Conseil de la santé publique recommande que :

- l’enfant, après avoir été familiarisé avec les lieux et les professionnels, soit

amené par son ou sa référent(e) ;

- il soit déshabillé (sauf les sous-vêtements à l’exception éventuelle de très jeunes

enfants) et enveloppé rapidement (moins de cinq minutes pour la totalité de

l’enveloppement) dans des linges mouillés entourés d’un drap sec (ou film

plastique) et d’une couverture chaude. La tête reste libre. Le confort du patient

doit être préservé en portant notamment beaucoup d'attention aux faux plis lors

des enveloppements avec les différents linges ;

- en présence constante de deux à trois professionnels, la durée de chaque séance

soit de trois quarts d’heure avec échanges verbaux et non verbaux avec l’enfant.

• Après chaque séance, le Haut Conseil de la santé publique recommande que :

- un temps de relaxation avec collation soit réservé à l’enfant (possibilité de friction

corporelle) ;

- l’enfant rhabillé soit reconduit dans son groupe ;

- les professionnels opèrent un débriefing.

En conclusion, compte tenu de l’absence de risques notables identifiés à ce jour, le Haut Conseil

de la santé publique considère que la réalisation du packing ne présente pas de risques qui

justifieraient son interdiction. Cependant, l’existence de risques psychiques n’est pas exclue et

doit être prise en compte dans l'analyse bénéfice-risque de cette méthode de prise en charge, au

même titre que toutes les autres méthodes de prise en charge, médicamenteuse ou non, de

l'autisme.

Le Haut Conseil de la santé publique signale que ces recommandations doivent être intégrées

dans une démarche rationnelle et scientifique visant à statuer sur la place de cette pratique dans

la prise en charge complexe des enfants autistes.

De plus, le Haut Conseil de la santé publique préconise :

- une poursuite des travaux de recherche de nature neurophysiologique et clinique

pour mettre en évidence les effets bénéfiques éventuels et la balance bénéfices-

risques de ce traitement dont la connaissance ne repose jusqu’à présent que sur

des constatations empiriques. A ce titre, la mise en oeuvre du projet de recherche

financé par le PHRC et dirigé par le Dr Goeb est utile et attendue ;

- une traçabilité locale des événements indésirables associés à la pratique du

packing afin de permettre de dénombrer et de documenter ces événements dans

le futur.

Avis produit par la Commission spécialisée Sécurité des patients : infections nosocomiales et autres

événements indésirables liés aux soins et aux pratiques

Le 2 février 2010

Haut Conseil de la santé publique

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75350 Paris 07 SP

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