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Naissance et trajectoire du Groupe de contact
Naissance et trajectoire du Groupe de contact
Éléments pour
une histoire du
Groupe de contact
Ce texte est dédié à Jean Cournut
Le débat parlementaire sur la règlementation des psychothérapies, sa diffusion médiatique sur la scène publique, les exploitations politiques, idéologiques et mercantiles auxquelles il donne lieu, amènent les psychanalystes et les associations psychanalytiques à intervenir, que ce soit séparément ou de façon collective.
Ces interventions sont nécessaires, car l'actualité montre que si les psychanalystes ne s'occupent pas de la politique, la politique, elle, ne manque pas et ne manquera pas de s'occuper d'eux.
Mais tout le bruit qui accompagne ce débat public oblige à poser la question de ce qu'est, pour les psychanalystes et leurs associations, une politique pour la psychanalyse ; et quel rapport cette politique pour la psychanalyse entretient avec la pratique, la théorie et l'éthique de la psychanalyse freudienne. Faut-il penser, comme certaines prises de position incitent à le faire, que les psychanalystes cessent de se référer à leur pratique et à leurs théories dès qu'ils prennent la parole sur la scène sociale, oublieux de ce que l'inconscient leur apprend ; ou bien peut-on penser une politique pour la psychanalyse qui trouverait sa source et sa référence éthique au cœur même de l'expérience freudienne de l'inconscient ?
C'est de cette deuxième perspective dont voudrait témoigner l'histoire du « Groupe de Contact », groupe où tente de s'élaborer, entre membres d'associations historiquement opposées, une politique pour la psychanalyse freudienne qui n'a pu commencer à devenir pensable qu'après un long travail sur la pratique auquel certains se sont risqués.
En janvier 1997, après un premier échange de courrier entre Marilia Aiseinstein et Gricelda Sarmiento, un projet d'échanges cliniques entre psychanalystes freudiens de la SPP et psychanalystes lacaniens est envisagé. Une rencontre préliminaire a lieu peu après, avec Claude Dumézil et Jean-Pierre Faye, au cours de laquelle sont fixés la fréquence, mensuelle, des rencontres à venir, et leur lieu, la Maison des Sciences de l'Homme à Paris.
La première séance de travail se tient en mai 1997 ; y participent, choisis par cooptation : Marilia Aisenstein, Bernard Brémond, Jean Cournut, Gilbert Diatkine, Alain Didier-Weill, Claude Dumézil, Patrick Guyomard, Paul Israel, Patrick Miller, Gricelda Sarmiento ; Jean-Pierre Faye, philosophe et écrivain, est présent, et il est convenu qu'il assistera aux réunions ; il prend en notes les séances, en même temps qu'il incarne silencieusement la place du tiers, certes nécessaire à ce moment où s'engagent, pour une tentative de travail en commun, des psychanalystes membres d'associations qui s'ignorent ou se font la guerre depuis 30 ou 40 années. Le groupe est composé de la façon suivante: 4 psychanalystes membres d'une association affiliée à l'Association Psychanalytique Internationale (S.P.P), 1 d'une association non affiliée à l'I.P.A. et non-lacanienne (4e Groupe), et 5 membres d'associations d'orientation lacanienne.
La méthode de travail est décidée en commun : chacun à son tour exposera un fragment de sa pratique, auquel les autres réagiront, et qui sera interrogé selon les diverses références clinico-théoriques des participants ; l'ordre des exposés sera déterminé par tirage au sort à la fin de chaque séance, en respectant une alternance entre les psychanalystes membres de l'I.P.A. et ceux qui se réfèrent plus particulièrement à l'enseignement de Lacan.
Après un premier tour, où chacun des dix exposa et son travail et son style, la question fut posée d'un possible passage au public qui transmettrait les enseignements tirés de l'expérience. Il fut convenu que c'était prématuré, que les conditions n'étaient pas réunies pour une prise de parole en commun, et il fut décidé de poursuivre par un deuxième tour qui se donnerait pour tâche d'élaborer plus avant les différences et les divergences : l'expérience du premier tour, le climat de travail, respectueux de chacun, rigoureux sans sauvagerie, permettaient de s'avancer sur la voie d'une confrontation plus précise des références cliniques et théoriques, et d'un approfondissement des façons différentes ou divergentes de concevoir les processus psychiques et de penser l'expérience analytique.
Après deux années de rencontre mensuelle à la Maison des sciences de l'Homme, après aussi le départ de certains participants, l'expérience s'est poursuivie tour à tour chez les uns ou les autres, avec le souci d'élaborer aussi loin que possible les conséquences pratiques, théoriques et éthiques des différences entre nos conceptions de la psychanalyse : chaque exposé clinique a dès lors donné lieu à plusieurs séances de reprise et de réflexion.
Le décès de Jean Cournut est venu donner un coup d'arrêt brutal et douloureux à notre travail. La poursuite, ou plutôt maintenant la relance de l'expérience, est suspendue à ce temps de deuil.
C'est au printemps 1999 que Jean Cournut et Claude Dumézil lancèrent un projet un peu décalé : nos rencontres cliniques se trouvaient de plus en plus souvent parasitées par l'envahissement de ce qui commençait à devenir un débat politique et public : les intentions annoncées des pouvoirs exécutif et législatif dans le domaine d'une réglementation de l'exercice des psychothérapies. Pour que notre travail clico-théorique ne soit pas paralysé par cette actualité, il fut décidé que les membres du groupe se réuniraient à un autre moment et en un autre lieu, pour aborder les problèmes liés à ces projets de réglementation et leurs conséquences sur l'exercice de la psychanalyse, sur les sociétés analytiques et sur la formation des psychanalystes, autant de dimensions auxquelles il ne pouvait être question de rester indifférents.
C'est ce temps qui marque la naissance du groupe de contact : il prend ses racines dans l'expérience clinique qui le précède et dans le climat de confiance qui en est résulté.
Au titre de ce que l'on peut aujourd'hui appeler un acte de naissance, mentionnons la décision des membres du groupe clinique de produire chacun, un par un, un texte sur leur conception de la cure psychanalytique et sa relation à la psychothérapie. Il s'agissait d'abord de définir la psychanalyse, dans le souci essentiel de l'extraire de ce qui se présentait de plus en plus comme « champ des psychothérapies », où la psychanalyse courait le risque d'être amalgamée et donc dépouillée de sa spécificité.
Ces textes furent écrits et lus, et mission fut confiée à Marilia Aisenstein et Claude Dumézil d'en extraire un texte qui pourrait être reconnu comme commun. Ce texte a été réalisé, et après discussion, il recueillit, le 16 janvier 2OOO, l'approbation des membres du groupe. Mais il fut décidé de ne pas le faire connaître : là non plus, les conditions n'étaient pas réunies pour une prise de position commune et cosignée de ceux que l'histoire du mouvement psychanalytique avait si longtemps divisés, et dont les institutions restaient pour la plupart dans la plus grande méfiance à l'égard de cette démarche. Aujourd'hui, ce texte peut être ici présenté :
« a) La psychanalyse est une investigation de processus mentaux inaccessibles autrement et une méthode thérapeutique qui se fonde sur la découverte freudienne et son enrichissement ainsi que l'extension de son champ d'application.
b) La référence à l'inconscient comme au transfert lui est indispensable et exclut toute formation à qui n'en a pas fait l'expérience personnelle sur le divan.
c)La psychanalyse inclut la pratique de variantes de la cure adaptées à l'organisation psychique de certains patients.
La psychanalyse se démarque de toutes les autres méthodes psychologiques et psychothérapiques car en privilégiant l'interprétation du transfert, au lieu de l'utiliser, elle cherche – sans aucune volonté d'adaptation à quelque modèle préétabli que ce soit – à éliminer autant que faire se peut toute suggestion.
d) Comme conséquence logique de ces principes se dégage la nécessité d'un cadre de la cure en relation avec l'éthique psychanalytique requérant du praticien une neutralité et une confidentialité confondues à la technique même de la psychanalyse. »
Le groupe de contact s'est rapidement élargi, au courant de l'année 2000, à d'autres responsables d'associations psychanalytiques : Évelyne Séchaud, présidente de l'Association Psychanalytique de France, Daniel Zaoui, puis Gérard Bazalgette pour le 4e Groupe, Jacques Sédat pour Espace Analytique, Jean Bergès pour l'Association Freudienne Internationale (devenue depuis Association Lacanienne Internationale), et Gérard Pommier, l'un des initiateurs de la Fondation Européenne pour la Psychanalyse. C'est dire que, né du groupe clinique, le groupe de contact n'a pris sa dimension qu'avec d'autres apports et d'autres influences, divers, hétérogènes, venant de toutes les institutions analytiques françaises hors l'École de la Cause.
C'est au cours de cette année 2000 que le groupe de contact a participé aux rencontres organisées au Sénat, l'une par Monsieur le Député Accoyer, auteur de l'amendement aujourd'hui connu, l'autre par Monsieur Marchand.
En avril 2001, la décision collective fut prise d'une action concertée : chaque association, en son nom - une par une mais toutes simultanément - adressa aux pouvoirs publics – Monsieur Kouchner, ministre de la Santé, et Madame Guigou, ministre de l'Emploi et de la Solidarité - un courrier qui attirait leur attention sur la gravité des risques qu'une législation telle qu'elle se dessinait ferait courir à la psychanalyse, et qui insistait sur l'urgente nécessité de s'opposer à toute tentative d'amalgamer la psychanalyse au champ des psychothérapies. Il s'agissait, en reconnaissant le légitime souci des pouvoirs publics en matière de santé publique et de protection des personnes (lutte contre les sectes et le charlatanisme), de faire apparaître clairement que le remède pouvait être pire que le mal, et qu'une législation adoptée dans la précipitation serait au mieux inutile, au pire d'effet strictement contraire aux intentions du législateur.
Les associations psychanalytiques alors partie prenantes de cette démarche furent:
Analyse Freudienne (A.F.),
Association Lacanienne Internationale (A.L.I.),
Association Pour une Instance (A.P.U.I.),
Association Psychanalytique de France (A.P.F.),
Centre de Recherche En Psychanalyse et Écriture,
Mouvement du Coût Freudien,
Espace Analytique,
Fondation Européenne pour la Psychanalyse (F.E.P.),
Quatrième Groupe (O.P.L.F.),
Société de Psychanalyse Freudienne (S.P.F.),
Société Psychanalytique de Paris (S.P.P.).
L'École Sigmund Freud s'est ensuite ajoutée à la liste de signataires.
Il faut ici préciser que, si une co-signature des « associations freudiennes membres de l'A.P.I. » et des associations « freudiennes avec Lacan » n'est toujours pas possible en ce temps-là, l'action commune, concertée et affirmée comme telle, l'est devenue ; ce dont témoignent le courrier qui suit, composé de deux lettres adressées aux ministres mentionnés, co-signées par six associations « lacaniennes » mais pas sans référence à ce qui d'élabore dans le groupe de contact: on trouvera ces deux lettres en annexe A.
La réponse du Ministère de la Santé, en remerciant les associations de leurs observations, les informait que l'A.N.A.E.S. (Agence Nationale d'Accréditation et d'Évaluation en Santé) allait être très prochainement saisie d'une mission de définition et d'évaluation des méthodes psychothérapeutiques, et que son rapport serait préalable à toute élaboration d'une réglementation, travaux dont les associations psychanalytiques seraient informées. C'est à la même période que le ministère fit savoir à l'Assemblée nationale qu'il avait mis ces questions à l'étude et ferait bientôt des propositions, faisant ainsi savoir qu'il entendait garder la main sur ce dossier sans laisser l'initiative aux parlementaires.
Le changement de majorité et de gouvernement de mai 2002 allait marquer un point d'arrêt à ce parcours, les projets d'encadrement des pratiques psychothérapiques n'étant pas au rang des priorités du nouveau gouvernement.
Il n'est pas inutile de rappeler ici que parallèlement au groupe de contact, le groupe clinique qui en fut à l'origine continue son travail et sa démarche : la confrontation des différences et des divergences théoriques s'est précisée, la confiance autorise une plus grande liberté, moins de guindage dans la mise au travail des divergences. Les points cruciaux qui séparent les théorisations « freudiennes » des concepts élaborés avec Lacan sont abordés : ils portent essentiellement sur la conception des processus psychiques, en particulier leur dimension économique, et sur la question du temps, dans la vie psychique et dans l'expérience de la cure. A l'été 2003, les participants du groupe décident de tenter d'écrire à propos de cette expérience partagée de travail sur leur clinique et leur pratique de la cure. On trouvera en annexe ces textes, présentés en juillet 2003.
Le 8 octobre 2003, l'amendement Accoyer est voté par l'Assemblée Nationale, à l'unanimité des députés présents, dans le cadre du projet de loi de Santé Publique. La surprise est générale, malgré la vigilance conservée par les associations psychanalytiques, et en particulier par les associations membres du groupe de contact. Le répit, laissé par le changement de gouvernement pour lequel ces projets de réglementation n'était pas d'actualité, avait été utilisé pour un travail de réflexion et d'échange sur la façon dont chaque association pense et pratique les rapports de la psychanalyse et de l'université, et donc les questions de transmission de la psychanalyse et la place qu'y prennent les universitaires-psychanalystes.
Ce répit fut donc de courte durée, le vote de l'Assemblée Nationale exigeant une mobilisation et des réactions rapides. Les associations et leurs responsables multiplièrent les démarches auprès des personnalités politiques les plus en charge de ce dossier, et particulièrement auprès des sénateurs qui allaient avoir à discuter cet amendement, d'abord au sein de la commission des Affaires Sociales du Sénat.
Sur la scène publique, ce fut le moment choisi par Jacques-Alain Miller pour médiatiser au maximum le débat et créer l'illusion d'un « champ psy » que l'École de la Cause allait unifier sous sa bannière au moyen du ciment que constitue l'appel au « front du refus » et à « la désobéissance civile ».
Plus discrètement, le groupe de contact a accéléré le rythme de ses rencontres et de son travail, chaque association mettant en œuvre des démarches dont elle informait aussitôt l'ensemble des participants. Certaines de ces démarches auprès des pouvoirs publics furent faites en commun par plusieurs associations, et au cours de rencontres avec des personnalités politiques placées au premier rang de ce dossier, des associations présentes représentèrent les autres associations. C'est à ce moment que les Forums du Champ Lacanien vinrent rejoindre le groupe de contact et s'associer à sa démarche.
La politique du groupe de contact, élaborée au long des années et des séances de travail, n'a pas varié sur le fond : il s'agit de défendre la spécificité de la psychanalyse, d'empêcher son intégration à l'illusoire champ « des psychothérapies », et de faire en sorte que la pratique psychanalytique et la formation des psychanalystes restent sous la responsabilité pleine et entière des institutions psychanalytiques.
Il n'est pas excessif de penser que l'ensemble des démarches accomplies par les associations membres du groupe de contact ont manifesté, dans le respect des singularités et des différences, une concertation et une cohérence qui ont fait leur efficace dans une situation devenue très confuse et où la saisie des enjeux pour la psychanalyse était rendue très difficile par l'excitation médiatique orchestrée par la politique de l'École de la Cause.
Le 19 janvier 2004, le Sénat a voté l'amendement Mattéi qui remplace l'amendement Accoyer ; cet amendement maintient clairement la psychanalyse hors du champ de la réglementation appliquée à l'exercice de la psychothérapie. N'en déplaise aux unificateurs du « champ psy » qui n'existe pas, les psychanalystes peuvent pour le moment se réjouir de ce qui constitue une victoire relative, et provisoire, là où le pire était encore tout récemment prévisible.
Suite au vote du Sénat, les responsables des institutions psychanalytiques membres du groupe de contact ont décidé de manifester publiquement leur prise de position, par le texte qu'on trouvera en annexe C, adressé aux députés et à la presse.
Avec ce texte, on saisira le chemin parcouru ; ce que l'histoire du mouvement psychanalytique français rendait impensable est désormais pensé et réalisé. Des institutions séparées et étrangères les unes aux autres peuvent désormais co-signer un texte qui fait état de leur conception commune lorsqu'il s'agit de défendre la spécificité de la psychanalyse et de la pratique freudienne.
L'expérience du groupe clinique, à partir de 1997, marquait historiquement la reprise de relations de travail entre les deux fractions opposées de la psychanalyse en France : des praticiens des deux camps décidaient de s'écouter réciproquement parler de leur pratique et élaborer leurs différences.
Cette expérience a permis la naissance du groupe de contact, qui marquait un second temps, celui de l'échange et du débat pour tenter de penser la possibilité d'une politique concertée de la psychanalyse, une politique qui trouve sa source dans la confrontation clinico-théorique et non dans les stratégies politiciennes visant le leadership intellectuel ou l'obtention de parts du marché universitaire, culturel, ou de la formation. Il n'y a pas de représentant patenté ni garanti de l'expérience de l'inconscient.
Ce texte du 29 février 2004, ponctuation de l'histoire du groupe de contact à ce jour, inscrit une nouvelle étape ; il est à mettre en perspective avec celui du 19 janvier 2000 cité plus haut et qui n'avait pas pu être rendu public. Si l'on ne s'interdit pas de penser les relations entre les institutions psychanalytiques sur le modèle des relations entre « les instances de la personnalité psychique » (Freud), et si l'on accepte l'idée que « les conflits intrasubjectifs sont structurés comme des conflits intersubjectifs » (Lacan), on prendra le mesure du travail accompli au cours de ces quelques années, et de l'ouverture qu'il apporte pour l'ad-venir du mouvement psychanalytique, espoir vivant malgré les difficultés que l'évolution du lien social dans la société d'aujourd'hui ne manquera pas d'opposer à l'exigence éthique de la découverte freudienne.
Texte de Bernard Brémond,
avec les participations de Marilia Aisenstein
Gricelda Sarmiento
et Claude Dumézil.
ANNEXES
ANNEXE A
1.
« Association Analyse Freudienne
Association Freudienne Internationale
Association pour une École de la Psychanalyse
Cartels Constituants de l'Analyse Freudienne
Fondation Européenne pour la Psychanalyse
Psychanalyse Actuelle
A Madame Élisabeth Guigou,
Ministre de l'Emploi et de la solidarité
Monsieur Bernard Kouchner,
Ministre délégué à la Santé
Paris, le 7 mai 2001
Madame la Ministre de l'Emploi et de la Solidarité,
Monsieur le Ministre délégué à la Santé,
Un « groupe de contact » réunissant des membres d'un certain nombre de Sociétés de Psychanalyse s'est réuni dès 1998 afin de réfléchir aux problèmes soulevés par les projets de réglementation de la psychothérapie en cours dans notre pays. Les membres de ce groupe, réunis à l'initiative du Président de la Société Psychanalytique de Paris sont issus des sociétés suivantes :
Association Analyse Freudienne
Association Freudienne Internationale
Association Pour Une Instance
Association Psychanalytique de France
Centre de Recherche en Psychanalyse et Écriture
Cercle Freudien
Espace Analytique
Fondation Européenne pour la Psychanalyse
Quatrième Groupe, Organisation Psychanalytique de Langue Française
Société de Psychanalyse Freudienne
Société Psychanalytique de Paris
Chacune de ces sociétés adressera son point de vue à votre Ministère. Nous vous envoyons ci-joint celui qui a été adopté en commun par les six associations.
Veuillez agréer…
2.
« Association Analyse Freudienne
Association Freudienne Internationale
Association pour une École de la Psychanalyse
Cartels Constituants de l'Analyse Freudienne
Fondation Européenne pour la Psychanalyse
Psychanalyse Actuelle
A Madame Élisabeth Guigou,
Ministre de l'Emploi et de la solidarité
Monsieur Bernard Kouchner,
Ministre délégué à la Santé
Paris, le 7 mai 2001
Madame la Ministre de l'Emploi et de la Solidarité,
Monsieur le Ministre délégué à la Santé,
Une réglementation prochaine de l'activité des « psychothérapeutes » a été annoncée par Madame la Secrétaire d'État à la Santé et aux Handicapés lors de la séance de l'Assemblée Nationale du 11 janvier 2001. Monsieur le conseiller Obrecht nous avait déjà informés de ce projet gouvernemental, élaboré dans un souci de santé publique et de protection contre les dérives sectaires. Comme il nous l'a confirmé par écrit, cet éventuel « statut de psychothérapeute » serait obtenu grâce à un diplôme universitaire (de psychiatrie ou DESS de psychologie) joint à une formation dans une « société de psychothérapie » agréée, sur la base d'un cahier des charges.
Or aucune de ces deux conditions n'assurera la sécurité des usagers. D'une part, un diplôme univrsitaire ne forme à aucune sorte de « pratique du psychisme ». Et d'autre part, sur quels critères seraient sélectionnées des « sociétés de psychothérapie » à agréer ? Dans les dernières décennies, des centaines de psychothérapies ont vu le jour. Ces pratiques se sont regroupées dans quelques associations dont l'intitulé masque leur grande diversité. On peut évaluer l'extrême hétérogénéité que couvrirait un titre de « psychothérapeute » en consultant la liste de syndicats comme le SNPPSY et l'AFFOP. Il recouvrirait des pratiques aussi variées que le « rebirth », le « new-age », la « psychothérapie tibétaine », le « cri primal », l' « amourothérapie », la « gestalthérapie », etc. De plus, des nouvelles techniques apparaissent constamment, en fonction de l'échec des précédentes et de la mode. Comment les pouvoirs publics choisiront-ils entre ces innombrables méthodes ? Aucun critère scientifique ne permet de le faire. Et s'il fallait entériner le statu quo, il abrite déjà des associations à tendance sectaire, et des pratiques de suggestion de même nature.
L'actuel projet gouvernemental reprend à son compte à la fois la proposition de loi du député Accoyer (qui réserverait le titre de psychothérapeute à certains diplômés universitaires), et la proposition de loi du député Marchand (qui le réserverait aux membres d'associations déjà existantes de psychothérapeutes). Mais les défauts de la première proposition ne sont pas compensés par la seconde. Elle lui ajoute au contraire ses défauts propres, en donnant de plus faussement l'impression d'une unité de pratique, inexistante. Il est illusoire de penser qu'un diplôme universitaire peut pallier le caractère fantaisiste de la plupart des « psychothérapies », et réciproquement ces « psychothérapies » ne pallieront pas l'absence de formation pratique du cursus universitaire. En réalité, l'actuel projet revient à délivrer un diplôme sous une responsabilité de l'État, à peine dissimulée par une « commission de spécialistes », qui sera un lieu de marchandage et de partage du marché, en l'absence de références scientifiques.
En tant que psychanalystes, nous avons la responsabilité d'alerter les pouvoirs publics sur les faits suivants : on ne peut définir une « psychothérapie », mais seulement des « effets psychothérapeutiques ». Ces « effets » résultent de la suggestion psychique : un médecin, un psychologue, un psychiatre peuvent considérer à bon droit que leur acte engendre un bénéfice psychothérapeutique. Mais ce résultat peut se constater aussi dans la relation avec un musicien, un peintre, un danseur, ou à fortiori avec un religieux. Naturellement, nul n'interdit à un clinicien, à un musicien ou à un peintre de s'intituler « psychothérapeute ». Mais ce qualificatif ne peut être garanti par l'État (il en va d'ailleurs de même pour la psychanalyse). Le qualificatif « psychothérapeutique » peut être attribué à tout ce qui soulage les souffrances psychiques, mais il ne saurait constituer un statut. Il n'existe pas de « psychothérapie » (au singulier) dont on pourrait faire la description, de même qu'on ne saurait établir une liste exhaustive de « psychothérapies ». Le qualificatif de « psychothérapeutique » ne permet pas de définir le substantif d'un statut, titre qui tromperait gravement le public avec la caution de l'État : sa promesse aggraverait considérablement les problèmes de santé qu'il se propose de solutionner. Comme l'effet psychothérapeutique s'appuie sur la suggestion, la possibilité d'abus ne sera pas l'exception, mais la règle.
Ces raisons de fond invitent d'autant plus à un principe de précaution et à surseoir à un statut de psychothérapeute, qu'il faut aussi prendre en considération le lobbying employé à tous les niveaux par les associations de psychothérapeutes, dont les méthodes jettent un doute sur leurs ambitions. Un examen des textes et des procédés employés devrait amener à un principe de précaution élémentaire : on ne peut ignorer que parmi les regroupements de psychothérapeutes les plus représentatifs, le SNP-Psy a été la partie la plus active de la FFdP qui apparaît comme un mouvement à caractère sectaire (cf. ainsi qu'une analyse du rapport et annexes de l'AFNOR). L'unification de surface des pratiques les plus diverses destinées à répondre de toutes les problématiques, aussi bien celles du couple, de la drogue, de la violence dans les banlieues, etc., et cela sans référence théorique ni par conséquent déontologique, évoque une entreprise marketing destinée à avoir accès aux fonds publics (remboursements de soins et budget de formation).
Parmi les éléments préoccupants, on constate par exemple que nombre de responsables d'associations de psychothérapeutes s'autoproclament psychanalystes, alors qu'ils n'appartiennent à aucune association de psychanalystes et n'ont bénéficié de la formation d'aucune d'entre elles. Cette désinvolture ne laisse pas bien augurer de leurs prétentions futures.
Si malgré notre avis une réglementation du titre de psychothérapeute devait voir le jour, la formation psychanalytique devrait être formellement exclue des textes concernés. En effet, d'une par la formation psychanalytique réclame, outre une analyse personnelle, d'appartenir ou d'avoir appartenu un temps suffisant à une association psychanalytique. D'autre part, la psychanalyse ne saurait cautionner des pratiques au rabais qui cherchent à tirer bénéfice du prestige de la psychanalyse en jouant sur la confusion « psy ».
De leur côté, les psychanalystes ne réclament pas une réglementation d'État. Depuis un siècle, la psychanalyse a progressé grâce aux mêmes principes, sa méthode est restée inchangée, et son corpus théorique demeure stable : c'est fortes de cette autorité que les associations psychanalytiques considèrent de leur responsabilité de faire connaître les risques que ferait courir à la santé publique l'attribution par l'État d'un titre impossible à garantir, et gros de toutes les dérives.
….
ANNEXE B
textes de
Marilia Aisenstein
Bernard Brémond
Jean Cournut
Claude Dumézil
Patrick Miller
Gricelda Sarmiento
écrits entre mars et juillet 2003
et présentés à la séance
du groupe clinique du 2 juillet 2003
« L'analyste étranger ou barbare… »
7 juin 2003
Marilia Aisenstein
Il y a environ trente ans, je passais les épreuves écrites du baccalauréat. Le sujet de l'épreuve de philosophie m'avait beaucoup intéressée. Il était insolite : « étranger, sauvage, barbare… ».
Je serais aujourd'hui bien incapable de le traiter en 4 heures, il est d'ailleurs fort probable que je n'obtiendrais jamais la fort bonne note qui me fut attribuée.
Le thème de cette dissertation m'est revenu en mémoire en pensant à nos échanges. Il m'est venu que « les autres », les « lacaniens » avaient dans un temps révolu été mes « barbares » ou mes « étrangers ».
Le sauvage en effet est celui dont on dénie la civilisation. L'étranger lui, en aurait une, qu'elle soit admirée, enviée ou décriée. Le barbare, lui, vient d'un monde qui fait peur. Il inquiète car potentiellement ennemi, voire occupant.
Venant du monde de la philosophie, j'avais fini de rédiger un mémoire sur la pensée par analogie chez Aristote - elle ouvre l'univers de la métaphore – quand je commençai à me poser la question de l'analyse. Ce n'était pas une quête intellectuelle. J'étais gravement déprimée, ne sachant pas comment m'orienter. La dictature des colonels s'était installée en Grèce, l'idée de préparer l'agrégation de philo pour devenir professeur me donnait la nausée… la lecture de Freud m'avait intéressée, je n'étais pourtant pas encore convaincue. Je voulais aller mieux : « guérir ». Tout m'aurait naturellement portée vers l'école lacanienne, plus « brillante », plus « intelligente » dirait-on, hors là ma conviction que moi j'étais une « vraie malade », totalement inintéressante me disais-je.
Je craignais donc d'être « foutue à la porte » au bout de 5 ou 10 minutes. Mon idée à l'époque, confortée dans les amphis de philo par les camarades en analyse, était que les divans lacaniens se méritaient. Ils étaient réservés à une élite intellectuelle dont je me sentais exclue.
Je me dirigeai donc vers les autres plus ternes à mon avis mais plus soucieux du mal-être. Il me fallait de plus un psychiatre, les psychanalystes laïques étant pour moi des charlatans… Je réclamais de plus des médicaments qui me furent refusés…
C'est ainsi que les « lacaniens » sont devenus mes « étrangers », des psy d'une autre culture que je pouvais admirer et critiquer, avec toujours une pointe d'envie car je ne m'estimais pas assez « guérie » pour être des leurs.
Devenue moi-même analyste, j'avais rejoint la S.P.P., parcours assez naturel puisque mon analyste en faisait partie. Nous étions dans une période que je qualifierais de « guerre froide » avec la lacanie.
J'ai donc tardé à lire Lacan, qui est d'ailleurs un auteur difficile. Je suis pourtant toujours restée curieuse et intéressée de ces collègues « étrangers ou barbares ». Quand Claude Dumézil et Gricelda Sarmiento m'ont proposé des échanges réguliers, j'ai d'emblée été enthousiaste. Le groupe clinique a été pour moi très intéressant et j'ai beaucoup regretté sa non stabilité. J'ai pu constater que malgré nos prismes théoriques si divers, ce qui était analytique l'était en général pour nous tous.
Je crois avoir bien compris certains concepts : la jouissance, le réel, certaines différences sur le maniement du transfert et de l'interprétation qui m'ont enrichie.
Il reste quand même une ligne de démarcation : le cadre et la séance variable. Quand Alain Didier-Weill dit : « Il y a un cadre par patient », je peux le suivre, mais quand il nous dit qu'il enlève sa montre, je me rebelle car s'il est une symétrie entre les deux protagonistes – analyste et patient – c'est d'être soumis au même temps qui passe ; figure paradigmatique de la castration.
A mon sens, la séance fixe est le lieu qui permet d'expérimenter l'atemporalité de l'inconscient. En écrivant ces lignes me viennent deux idées. La première est la peur d'être « foutue à la porte sans avoir eu le temps de me taire », qui avait été la mienne avant l'analyse, et la continuité de ma réserve à l'endroit de la variabilité du temps des séances. La seconde est que nous sommes parvenus à un degré de confiance et d'estime réciproque « suffisant », au sens de Winnicott, pour pouvoir nous parler véritablement.
Autre chose : qu'est-ce qui fait que par-delà les oppositions les plus drastiques, un analyste en reconnaît une autre ? Je me suis déjà posée cette question face à des collègues kleiniens, bioniens… Les réponses ne me semblent pas faciles, mais peut-être faut-il creuser cette question.
A ce point, je me dis que j'aimerais continuer…
Remarques provisoires pour le groupe clinique
Réunion du 2 juillet 2003
Bernard Brémond
J'ai abordé les rencontres de notre groupe sur la base de ce que j'appellerai volontiers un certain type de transfert de travail, qui mettait en jeu ce que j'ai appelé la fonction “analyste supposé étranger”. Cette formulation m'est venue pour rendre compte de ma position en faisant jouer la supposition sur ces deux versants: analyste, étranger.
Travailler avec des “freudiens orthodoxes” (c'était une des nominations de départ, mais que la question de l'orthodoxie est donc inconvenante aujourd'hui!...) c'était pour moi rencontrer des analystes dont je supposais a priori qu'ils en savaient plus que moi (sur la théorie freudienne, sur la conduite de la cure...). Ayant accompli tout mon parcours dans les milieux lacaniens, je n'avais rencontré les autres analystes freudiens que dans le cadre de travaux théoriques qui, la plupart du temps, m'avaient impressionné par leur organisation rigoureuse. Et les attaques parfois acerbes contre ceux-là et leurs écrits dans les cénacles que je fréquentais, venant des “lacaniens” plus que de Lacan lui-même, avaient eu plutôt pour effet sur moi de conférer à ceux qui étaient ainsi attaqués un certain prestige (si j'excepte tout ce qui concerne les dérives de la psychologie du moi...). Ce transfert de travail comportait aussi le fait que j'étais, et reste toujours, convaincu que j'avais beaucoup plus à apprendre, pour ma propre expérience de l'analyse et pour ma pratique, des analystes “classiques” que des millériens. Je savais que dans ce cadre, aucune singerie mimétique de Jacques Lacan n'aurait chance de séduire: nous voulions travailler, et le mimétisme n'est rien d'autre qu'un refus de penser.
Peut-être me faut-il préciser aussi que j'ai vu l'École Freudienne se dissoudre au moment des débuts de ma “formation”, et que j'en ai gardé le sentiment que cette formation - cette partie de la formation de l'analyste en dehors de l'analyse personnelle et des contrôles - s'en était trouvée comme écornée, sentiment qui n'a pu être corrigé qu'avec l'expérience que nous soutenons maintenant à Analyse Freudienne.
En venant participer à notre groupe, nul doute donc pour moi que je venais à la rencontre d'analystes supposés.
Supposé étranger: cela tient à l'histoire du mouvement analytique, à la façon dont je l'ai reçue ou vécue. “Ceux de l'I.P.A.” étaient des étrangers: de par leur refus de l'enseignement de Lacan, et de par l'expérience de mon analyse, dont je pense toujours qu'elle relève de ce qu'on peut appeler une conduite lacanienne de la cure, ou même une “analyse lacanienne”, lacanien signifiant pour moi “freudien avec Lacan”. J'appelle pour le moment “lacanienne” une analyse freudienne où le transfert est la voie qui oblige à “penser” (au sens des pensées inconscientes) la division du sujet entre savoir et vérité, et où les conflits imaginaires sont la voie des possibles réalisations symboliques qui sont les visées de l'analyse. En quoi ces éléments de “définition” permettent-ils vraiment de distinguer entre freudien et freudien avec Lacan, l'expérience de notre travail ensemble ne me permet pas encore véritablement de répondre.
J'allais à la rencontre d'étrangers, désirant cette rencontre et sachant qu'ils la désiraient aussi.
Aujourd'hui?
Comme l'a fait un jour remarquer Jean Cournut, le temps est venu où les dénominations-étiquettes des uns par les autres sont devenues caduques et ont chuté: on n'a plus besoin de s'étiqueter d'“orthodoxes” ou de “lacaniens” pour échanger sur la pratique et la théorie analytiques et penser de face nos différences et nos divergences. Je me souviens de ma réflexion à l'issue de notre premier tour de travail: je disais que nous nous posions bien les mêmes questions, que nous soutenions les mêmes enjeux de et pour la psychanalyse, mais qu'à ces questions nous apportions des réponses différentes et sans doute divergentes sur certains points. Ce premier tour de notre travail, où nous avons entendu chacun dans sa pratique, dans son élaboration et la présentation de sa pensée dans le transfert, est celui qui m'a le plus intéressé, l'énonciation singulière de chacun dans l'écoute ouverte des autres y occupait le premier plan. Ce temps a été pour moi l'expérience d'un véritable dispositif de “formation permanente” du psychanalyste tel que je le conçois.
Je garde aussi en mémoire cette exclamation spontanée de Paul Israel, disant que sans doute les uns (dont il faisait partie), avec leur exigence concernant le cadre et la rigueur, se privaient par manque d'audace, de certaines surprises et de créations, mais que les autres (“lacaniens”) avec leurs prises de liberté, prenaient des risques dangereux pour les personnes et pour le processus analytique même. J'ai souvenir que cette remarque, reprise avec mes mots, témoignait que nous étions non pas dans des jugements négatifs les uns par rapport aux autres, mais devant l'exigence d'élaborer des différences, sans clôture a priori, idéologique ou morale, ou “orthodoxe”.
Nous avons ensuite voulu porter plus loin, et sans concessions, l'élaboration de nos différences et de nos divergences. Nous avons commencé ce travail, j'ai le sentiment sans doute partagé que nous ne l'avons pas mené assez loin, même si quelques points ont été réellement abordés.
Pour moi, ce second temps reste marqué par la possibilité que nous avons eue de commencer à échanger sur la question du temps à partir de points autres qu'idéologiques: nous devons, je crois, à nos échanges et aux formulations de Patrick Miller une approche de la question du temps des séances en fonction d'une conception du processus psychique et non en fonction de querelles idéologiques passées. Il apparaît me semble-t-il qu'aucun d'entre nous ne s'est fait le défenseur de “la séance courte”, que le débat a porté sur la variabilité ou non du temps de la séance et donc sur la portée de la scansion comme ouverture ou comme fermeture de l'inconscient. Ce débat n'est pas allé à son terme: je ne peux aujourd'hui, en ce qui me concerne, que faire la remarque suivante: alors que la durée fixe a les vertus de son côté “immuable”, qui je crois fait rencontrer à l'analyste comme à l'analysant la limite (la loi, et donc la castration) du côté du cadre, la scansion des séances et donc la durée variable est susceptible de faire rencontrer, à l'un comme à l'autre, “le mur du langage” dans la coupure de la parole; cela suppose qu'il n'y ait nul systématisme, que la séance puisse s'allonger aussi bien que raccourcir, et surtout cela comporte une part d'imprévu et de surprise qui en font toute la difficulté et sans doute imposent de reconnaître qu'en aucun cas la scansion de la séance ne peut être élevée au rang de règle technique: je dirais volontiers qu'il ne peut y avoir de scansion que comme formation de l'inconscient. Et il n'y a pas nécessairement de formation de l'inconscient à chaque séance.
Il y a un certain nombre de points sur lesquels nous avons commencé à échanger, et dont personnellement je souhaite que nous ayions l'occasion d'y revenir: la portée - et les portées - de la conception lacanienne du “symbolique” dans son rapport à l'affect et au réel; la question du Moi, si l'on convient que la critique lacanienne du Moi des postfreudiens tout à la fois est nécessaire et exige de reprendre l'élaboration des “fonctions du Moi”; le maniement du terme - ou de l'instance? - “préconscient”; l'interprétation, en particulier l'interprétation du rêve dans la cure... Une question insistante: à quelles conséquences porte la substitution du “désir d'analyste” au “contre-transfert, en ce qui concerne la conception de la transmission de la psychanalyse (la cure comme transmission du désir d'analyste, ce qui n'a pour moi rien à voir avec la fin de la cure définie comme production d'un analyste)?
Je rédige ces quelques notes un peu trop tard pour pouvoir développer et poursuivre.
Elles disent suffisamment sans doute mon désir de poursuivre l'expérience, avec le dispositif que nous avons adopté: l'un parle d'un fragment de sa pratique, et nous y travaillons autant de séances qu'il est nécessaire avant de passer à une autre fragment de pratique. Cela suppose sans doute une régularité soutenue, et de nouveaux partenaires?
Groupe clinique, Réflexions en cours
Jean Cournut, mars 2003
Une soirée par mois, très régulièrement, dix psychanalystes ayant déjà l'âge et l'expérience d'une longue pratique se sont réunis afin de confronter l'entendement que chacun élaborait à l'écoute du récit d'un cas exposé par l'un d'entre eux.
Pour cinq de ces praticiens la référence théorique était essentiellement freudienne, alors que pour les cinq autres elle était freudo-lacanienne. D'ailleurs quatre appartenaient à des institutions constituantes de l'Association Psychanalytique Internationale, et le cinquième n'en étant, semble-t-il, pas loin, tandis que les cinq autres affirmaient leur obédience lacanienne.
Le parti pris de départ fut celui d'un climat amical plus ouvert à une discussion que l'on espérait instructive, qu'à une confrontation polémique. Avec le recul de quelques années, j'hésite entre plusieurs mots aptes à qualifier ces rencontres. Information, plate-forme, carrefour, expérience ne me conviennent pas, alors que le mot « aventure » me paraît plus adapté, dans la mesure où l'on ne savait pas vraiment où nous allions et ce qu'il allait en advenir.
La bonne volonté et la courtoisie des débuts ont probablement retardé – ou fait mûrir ? – l'énoncé des désaccords. Je dois dire toutefois – et c'est étonnant et notable – que, en deçà du style personnel de chacun et probablement à distance de ses options théoriques, j'ai toujours eu le sentiment que j'entendais ce que les autres racontaient, et ceci tant du côté du patient que de celui de l'analyste, et que pareillement, à mon tour, j'étais entendu.
En revanche, ce ne sont pas tant les attendus théoriques lacaniens, pourtant parfois difficiles à suivre, qui m'ont gêné, que, bien davantage, le recours trop systématique à des notions clés qui me sont souvent apparues comme des « sésame » n'ouvrant guère le débat (il fut fait par exemple une grande consommation du « réel » !). L'autre divergence foncière concerna évidemment le temps des séances, leur durée, la salle d'attente, l'horaire, la scansion. Bien plus que techniques, ces questions me paraissent témoigner de la conception que l'on se fait du rapport humain psychanalytique en jeu dans la cure. Qui est le maître, qui décide, qu'en est-il de la séduction et de la relation sado-masochiste, de la complicité et de l'exploitation ? J'ai posé la question : ayant des conceptions si différentes, faisons-nous le même métier ? étant bien précisée – et ce n'est pas le moindre paradoxe – la convergence possible des écoutes.
A mon avis, nous en sommes là, avec toutefois une inquiétude quant à l'avenir : de quelles folies d'apprentis sorciers et de Pygmalion vont hériter les futurs analystes issus de nos divans si d'aventure leurs identifications les induisent inconsciemment à nous caricaturer ?
Groupe clinique, réunion du 2 juillet 2003
Claude Dumézil
Les incidences théoriques et éthiques de notre réflexion clinique ont contribué à faire la part entre une politique de l'inconscient et la politique institutionnelle.
En éclairant les frontières de la notion d'orthodoxie notre travail tranchait avec les querelles lacano-lacaniennes au point que l'on pouvait se sentir en phase avec une remarque issue de l'autre bord.
Il me semble avoir tiré profit des références de nos collègues au point de vue économique relativisant certains parti pris de structure ou un maniement trop exclusif de la dimension signifiante, même si je pense avoir montré une fois ou l'autre la pertinence clinique de la notion de sujet de l'inconscient pris au mot ou au pied de la lettre.
Jamais lassante l'écoute, dans le groupe, de tel ou tel, témoignait souvent d'un douloureux et fécond travail aux limites du théoriquement correct.
Comme chacun d'entre nous, je pense m'être enrichi de l'apport des butées de l'autre analyste quelque soit son obédience.
Sans doute notre travail a contribué à ouvrir les références théoriques de chacun. Ce n'est pas un moindre de ses effets, pour moi, que tous aient rejoint les quelques autres dont l'expérience et l'éthique sont présentes dans l'invention de la cure pour chaque nouveau patient.
La question se pose d'une suite à donner à nos rencontres. Un élargissement est souhaitable en préservant deux paramètres complémentaires essentiels : l'absence d'enjeux de prestance et l'audace de se montrer nus les uns les autres dans ce que l'on s'efforce de soutenir dans une pratique référée à Freud, à des auteurs post freudiens et en notre propre nom, en donnant nos raisons.
Pour notre réunion du 2 juillet 2003
Patrick Miller
Notre travail en commun de plusieurs années aura été l'occasion de vraies rencontres et, progressivement, de l'établissement de la confiance nécessaire pour s'exposer en entrant dans le détail du travail analytique. C'est là pour moi la réussite la plus importante de notre groupe de clinique psychanalytique.
Ce climat d'échanges amical ne nous a pas conduits à un faux « oecuménisme » mais plutôt au constat de différences, parfois profondes. Au point de se poser la question : faisons-nous le même métier ?
Dans l'intention, certainement. La référence à l'inconscient et à Freud est commune. Mais dès que nous poussons un peu la description des enjeux de la cure, nous nous paercevons que nous ne nous référons pas aux mêmes représentations théoriques de l'inconscient. La ligne de division la plus importante se trouve vraisemblablement du côté de la deuxième topique, du Ca, de la mise en jeu dans la cure du facteur économique, entre force et sens, et – partant – de la mise en jeu de la subjectivité de l'analyste : travail de perlaboration pré-conscient, topique tierce, travail des affects.
Les différences concernant le cadre – qui sont les plus facilement repérables même si nous avons eu tant de mal à commencer à en parler vraiment – renvoient à mon avis à des différences de conceptions théoriques concernant les visées de la cure.
Ce lien entre conception du cadre et position théorico-clinico-éthique est difficile à montrer et à conceptualiser. Mais il est soouvent apparu dans nos débats et si nous devions approfondir les « enseignements » de nos rencontres c'est une des directions de réflexion qui me semblerait enrichissante.
C'est le biais qui me paraît le plus « scientifique » : essayer de penser de quoi est faite la relative cohérence entre théorie et pratique. C'est peut-être la seule façon de ne pas aborder les différences dans la technique d'un point de vue moralisateur mais à partir des conceptions des visées de la cure telles qu'elles découlent – parfois en partie à notre insu – de nos façons de penser le fonctionnement psychique, les origines de la vie psychique et son développement, et à partir de là les leviers que nous pensons utilisables pour permettre le changement psychique.
J'ai pris beaucoup de plaisir à nos échanges car ils ont exigé un effort soutenu pour tenter d'écouter « à partir de l'autre » en suspendant temporairement mes propres représentations-buts. Cela m'a permis d'entrer dans une certaine familiarité avec d'autres modalités de fonctionnement en séance. Je ne les ai pas adoptées pour autant mais j'ai été renvoyé à la nécessité intérieure d'avoir à essayer de mieux me justifier mes propres positions, donc de les regarder un peu – autant que possible – du dehors pour élargir ma « disputatio » interne. De cela, je ne peux que vous être reconnaissant à tous.
Pour les membres du groupe clinique
2 juillet 2003
Gricelda Sarmiento
Un groupe de travail clinique s'est organisé, où les participants se donnaient pour objectif d'illustrer, par leurs propos, leurs pratiques psychanalytiques respectives. Nous nous sommes réunis une fois par mois, et chaque intervenant était choisi par tirage au sort.
Le groupe est constitué par des psychanalystes de formation différente, les uns strictement freudiens, les autres proches de la conception psychanalytique de Lacan.
Au bout de quatre ans de travail, nous voulons faire le point concernant cette expérience.
J'avais bénéficié à Buenos Aires, au cours de ma formation, d'une analyse qui s'est effectuée pendant six ans avec deux psychanalystes argentins qui, à l'époque, étaient assez influencés par les approches de M. Klein, membres de l'I.P.A. Ensuite, l'analyse s'est poursuivie à Paris avec un psychanalyste d'orientation lacanienne.
J'ai connu donc les effets d'une double expérience, et à partir de cela, je fais part de ma pratique personnelle.
Une des grandes difficultés, que j'ai rencontrée au début, c'était le réapprentissage de certains concepts avec lesquels je n'étais plus familiarisée. Mes points de référence pour pratiquer la psychanalyse sont donnés actuellement par des petites lettres (a, A barré, RSI, $, sss, S, s), qui me permettent de penser l'espace analytique, et les mutations et transformations qui se produisent chez le patient.
Au début, les rencontres au sein de ce groupe prenaient, sans que nous le souhaitions, la forme d'un contrôle réciproque entre nous.
Ensuite, nous sommes passés à la discussion théorique qui justifiait telle ou telle intervention ou interprétation.
Ce qui m'a impressionnée dans un premier abord dans ce groupe de travail, c'était la sensation d'entendre des façons d'agir ou de diriger la cure comme quelque chose qui se situait, pour moi, dans le passé.
Il y avait des concepts que je n'utilisais plus, comme le maniement du « moi à moi », ou l'intersubjectivité entre analyste et analysant, le « contre-transfert », « l'excitation », « la qualité de… », « l'identification par autoengendrement », « le bon ou le mauvais objet ».
J'ai tardé un peu à m'apercevoir dans quelle confusion théorique j'étais plongée dans ces premières rencontres. Je ne pouvais pas entendre, dans sa réelle dimension, le récit de quelques analystes. Des efforts étaient nécessaires pour entendre des pratiques si différentes de la mienne. Je pressentais dans les propos de mes collègues une connotation imaginaire que je voulais fuir.
Peu à peu, néanmoins, j'ai pu entendre des positions différentes. J'ai lu leurs travaux, leurs publications, leurs interventions aux colloques et aux rencontres. Je n'entendais plus des concepts désincarnés pour rendre compte de la présentation de cas, mais j'ai pu percevoir les effets qu'ils obtiennent dans la pratique avec leurs patients.
C'est ainsi que j'ai pu apprécier la finesse de l'écoute de telle personne, la fermeté et la capacité qu'avait celui-là pour tenir sa place d'analyste, la possibilité d'élaboration théorique de tel autre. A ce niveau, j'ai pu entendre comment chaque analyste est mû par la dynamique de son inconscient. Ainsi, chacun de nous réinventait à chaque fois la psychanalyse, ce qui permettait de la transmettre d'une façon originelle.
J'ai pu en déduire que cette transmission ne s'effectuait pas seulement d'un collègue à l'autre, et que le patient lui-même recevait aussi cette transmission. Il avait bénéficié d'une psychanalyse et pouvait se repositionner dans son rapport à l'objet, découvrant le désir qui l'anime et limite ainsi sa jouissance.
Ces rencontres ont été positives à tous égards, par la possibilité qui nous a été donnée d'entendre des collègues, au-delà de leur appartenance à telle ou telle orientation psychanalytique ; les entendre là où émergeaient leurs capacités dans l'exercice de l'analyse a été le plus important.
Le psychanalyste a tout à apprendre de la bouche de l'analysant. Les théories élaborées par Freud et Lacan nous intéressent parce qu'elles donnent une cohérence et une unité à la découverte de l'inconscient.
Cette expérience m'a beaucoup enrichie et je tiens à remercier tous ceux qui l'ont rendue possible, nous donnant ainsi l'occasion de nous imprégner les uns et les autres de nos travaux respectifs.
ANNEXE C
« Des responsables d'associations psychanalytiques prennent position
Quels sont les faits ?
L'amendement gouvernemental 363 voté le 19 janvier dernier par une majorité de sénateurs est devenu le nouvel article 18 quater de la Loi de Santé publique. Il est rédigé ainsi : L'usage du titre de psychothérapeute est réservé aux professionnels inscrits au registre national des psychothérapeutes.
L'inscription est enregistrée sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département de leur résidence professionnelle.
Sont dispensés de l'inscription les titulaires d'un diplôme de docteur en médecine, les psychologues titulaires d'un diplôme d'Etat et les psychanalystes régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations.
Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.
Cet amendement est considéré par la très grande majorité des associations de psychanalyse qu'elles soient freudiennes ou lacaniennes, membres ou non de l'Association psychanalytique internationale (I.P.A.), comme une réponse positive aux demandes qu'elles avaient formulées : la reconnaissance de la spécificité de la psychanalyse et le rôle irremplaçable des associations dans la formation et la qualification de leurs membres. La réaction des syndicats de psychiatres et de psychologues ainsi que celle de certains Professeurs de psychologie à l'Université est plus nuancée. Ils souhaitent que leurs professions respectives et que la formation à la psychopathologie soient plus et mieux prises en compte. Au total, avec quelques aménagements, l'amendement gouvernemental devrait répondre à la protection du public et satisfaire l'ensemble des intéressés à l'exception de l'opposition irréductible de Jacques-Alain Miller et de ses différentes associations. Dans sa rédaction actuelle, l'amendement évite en effet les écueils qui rendaient inacceptables d'autres propositions antérieures : il ne valide pas les formations des instituts privés, et il ne légifère ni sur la définition ni sur l'exercice des psychothérapies.
L'amendement Gouteyron, qu'on lui opposait, était inspiré par les fédérations de psychothérapeutes et soutenu par Jacques-Alain Miller. Il prévoyait la mise en place d'un Conseil national des pratiques thérapeutiques relatives au psychisme prétendant à partir du seul préfixe commun « psy », donner une unité à un champ qui réunirait psychiatres, psychologues, psychanalystes et psychothérapeutes. Or ce champ n'existe pas, ne serait-ce que dans la mesure où la manière de prendre en compte la demande et de traiter le symptôme relèvent d'éthiques différentes, voire opposées. Sous le prétexte irréalisable et démagogique de rendre publiques les différentes pratiques déontologiques, ce Conseil national aurait eu en fait pour vocation d'écrire la loi, de la faire appliquer (enquêtes et recommandations déontologiques) et de remplir la fonction d'une police privée pour le compte de l'Etat !
Que mettent-ils en évidence ?
D'abord la pertinence de l'esprit dans lequel a été rédigé l'amendement voté par les sénateurs : se contenter de légiférer sur le titre de psychothérapeute et non sur un statut professionnel ou sur les conditions de la pratique des psychothérapies. C'est à la fois plus sage et plus réaliste. Qu'est-ce qui témoigne de cette pertinence ? L'absence depuis la date du vote, plus d'un mois, de la moindre critique sérieuse et argumentée de l'amendement, qui le remettrait fondamentalement en cause ; ni dans la presse ou sur les sites professionnels, ni dans les médias. Les seules critiques, avec celles déjà évoquées sur l'absence de référence à la psychopathologie, ont concerné la procédure utilisée au cours du vote lui-même. Les appels à un « front du refus » des psy contre le gouvernement , voire à la « désobéissance civile », ne peuvent pas en effet être considérés comme des arguments . Ils ne relèvent ni d'une analyse politique fondée de la situation pour les psychanalystes, ni d'une lecture effective de l'amendement 363 et n'apportent aucune critique de poids contre lui
Les péripéties qui ont précédé et accompagné le vote de l'amendement permettent aussi de jeter un jour sur la configuration actuelle du mouvement psychanalytique.
Au final, après la grande campagne médiatique pour les libertés, la stratégie de Jacques-Alain Miller apparaît en clair avec la promotion de l'amendement Gouteyron : prendre la tête d'une croisade idéologique sous prétexte de défendre la psychanalyse, tout en la noyant dans les psy tous genres confondus ; exiger, au nom des libertés publiques, en utilisant des intellectuels, des artistes et des hommes politiques de renom, le retrait de l'amendement Accoyer concernant la pratique légale des psychothérapies, puis se poser en définitive comme celui avec lequel les pouvoirs publics doivent négocier en acceptant, avec tous ses inconvénients, l'amendement Gouteyron . Se présenter enfin comme un leader incontestable pour les questions de « gestion du psychisme » . Sa politique hégémonique l'ayant condamné à une position minoritaire dans le mouvement psychanalytique français et parmi les lacaniens eux-mêmes, il semble poursuivre désormais des objectifs étrangers à la psychanalyse . Malgré sa prétention à faire pièce à lui tout seul à l'I.P.A., malgré ses intentions un moment proclamées de réunifier la psychanalyse, malgré la multiplication de structures bureaucratiques autour de l'Ecole de la Cause freudienne(E.C.F.) et la prolifération des sigles d'associations nouvelles, créées toujours avec les mêmes, celui qui a été nommé (sur quels critères ?) dans la presse « chef du parti des psys » sait qu'il ne règne en fait que sur son groupe, compact, mais isolé dans l'ensemble du mouvement psychanalytique . D'où, sans doute, son alliance tactique avec le vaste groupe des instituts privés de thérapeutes en tous genres .
Il convient de souligner aussi les risques et les dérives liés aux évaluations quantitatives et réductrices présents aussi bien dans le rapport Cléry-Melin sur la psychiatrie que dans le récent et contesté rapport de l'Inserm sur les psychothérapies.
D'un autre côté, la crise actuelle a confirmé ce qui était en germe depuis 1999 avec la mise en place du « groupe de contact » qui réunit des responsables des sociétés membres de l'I.P.A. et d'associations lacaniennes : l'élaboration par les psychanalystes français d'une politique commune sur des objectifs limités mais cruciaux pour la psychanalyse . Situation inédite depuis 50 ans et qui n'a été rendue possible qu'à partir de la reconnaissance « d'un bien commun » plus important que les différences : la référence effective de tous à Freud et la prise en compte de l'apport majeur de Lacan à la psychanalyse. Ce qui ne les empêche pas de mettre en débat leurs divergences .
Il est regrettable que le débat apaisé que chacun attend depuis le 19 janvier et que la situation appelle, n'ait pas eu lieu dans les médias qui, dans l'ensemble, continuent à agiter de manière fallacieuse des oppositions rendues caduques par le vote des sénateurs, faisant comme si ce dernier n'avait pas eu lieu .
Faut-il s'en étonner ? ou bien convenir que, comme le constatait déjà Aristote dans sa Métaphysique, « nous sommes devant l'évidence des faits comme les chauves-souris devant l' éclat du jour » .
Marilia Aisenstein (ancienne Présidente de la Société psychanalytique de Paris S.P.P.) ; Patrick Avrane (Président de la Société de psychanalyse freudienne S.P.F.) ; Jean-Jacques Barreau (membre du Bureau du Quatrième Groupe) ; Gérard Bazalgette (ancien Président du Quatrième Groupe) ; Jean Bergès (ancien Président de l'Association lacanienne internationale A.L.I.) ; Bernard Brémond (coordonnant d'Analyse freudienne)Monique David-Ménard (membre de la S.P.F.) ; Claude Dumézil (ancien coordonnant d'Analyse freudienne) ; Alain Fine (Président de la S.P.P.) ; Patrick Guyomard (ancien Président de la S.P.F.) ; Paul Israel (ancien Président de la S.P.P.) ; Claude Landman (ancien Président de l'A.L.I.) ; Jean-Pierre Lehmann (Président du Cercle freudien) ; Robert Lévy (coordonnant d'Analyse freudienne) ; Gérard Pommier (co-fondateur de la Fondation européenne pour la psychanalyse) ; Guy Roger (Président du Quatrième Groupe) ; Gricelda Sarmiento (membre du Centre de Recherche en psychanalyse et écriture) ; Jacques Siboni (Président du Centre de Recherche en psychanalyse et écriture) ; Colette Soler (membre fondateur des Forums et de l'Ecole de psychanalyse du Champ lacanien) ; Marc Strauss (ancien Président des Forums et de l'Ecole de psychanalyse du Champ lacanien) ; Bernard Vandermersch (Président de l'A.L.I.) ; Jean-Pierre Winter (Président du Mouvement du Coût freudien).
Paris, le 29 février 2004
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