Swing

Film américain (2001). Comédie dramatique. Durée : 1h 30 Avec Oscar Copp, Lou Rech, Tchavolo Schmitt, Mandino Reinhardt, Abdellatif Chaarani. Réalisé par Tony Gatlif

Au coeur du film, il y a le récit,bouleversant, que la grand-mère de Swing, vieille femme gitane, fait à Max, racontant sa déportation, la perte de sa famille, sa fuite avec son frère, tous deux jeunes enfants.

On l'entend chanter immédiatement après une berceuse, d'une voix pure, sortie du fond des âges. C'est à ce contraste que Max est confronté, ce faisant le scribe de ce peuple sans écriture, apprenant à son contact la nature, la liberté, l'indépendance. Tony Gatlif nous montre Max sortant de chez lui et y retournant, escaladant le haut portail fermé à clé de la maison familiale, nous ouvre les yeux sur la violence souterraine, insensible, du monde des gadgés, cette violence dont l'exclusion des gitans est un effet pointé avec une sensibilité juste.

L'histoire a été tournée à l'extrème bord de la ville, où les derniers contreforts des cités de béton jouxtent un paysage de ried encore sauvage, un lieu où la ville trempe ses pieds dans des bras de rivières courant dans une jungle inextricable, à la mesure des enfants qui y réinventent leur vie.

La musique, l'amour et la mort, la mémoire inusable, orale, des gitans, tressent le récit de la courte confrontation de Max avec le monde de Swing,avant qu'il ne redevienne, à nouveau happé par la normalité du milieu où il vit, un enfant comme tant d'autres, trimballé au gré du désir de ses parents sans qu'il y ait vraiment de place pour sa propre expression.

Ce film, minimaliste dans ses moyens comme dans son scénario, vériste dans sa forme qui tend au documentaire, est un chef-d'oeuvre d'écriture cinématographique, un point culminant du cinéma contemporain par la justesse de son épure, de sa sensibilité et de sa poésie sauvage, en ce qu'il montre la vie elle-même, que l'humanité massivement est en train de repousser dans ses marges. Tony Gatlif nous convainct de chercher des alternatives à la violence d'un monde devenu insensible à lui-même.

Didier Kuntz <didierkuntz@9online.fr>