Études de théologie morale autour du frère Albert Plé, O.P. de 1950 à 1980
Laurent Lemoine enseigne la théologie morale à l'université catholique d'Angers. H est également rédacteur en chef de la Revue d'éthique et de Théologie Morale, ainsi que rédacteur en chef adjoint de La Vie Spirituelle. ISBN 978-2-204-09137-4

Ecouter est une tâche d'humanité. C'est ce que tout homme doit pouvoir
offrir à l'autre en proie à une détresse dont il a envie de parler. Mais écouter peut devenir, dans certains cas, affaire de spécialistes.

Les Eglises chrétiennes ont une longue, très longue expérience de ce qui
s'appelait jadis la • direction spirituelle • et que l'on nomme plus volontiers
de nos jours l'« accompagnement spirituel -. Les modalités et le but de ces
accompagnements visent à faire grandir la relation avec Celui que les
Eglises confessent comme le Dieu de Jésus-Christ et, conséquemment, avec
autrui.

Or, depuis la fin du XIXe siècle, la psychanalyse, une toute nouvelle discipline, profane en son essence et en son déploiement concret, s'est donné
comme tâche similaire d'écouter la souffrance et la détresse qui cherchent à
se dire. Les modalités peuvent apparaître, dans un premier temps, assez
proches de la relation pastorale ou de la cure d'âmes des prêtres ou des
pasteurs chrétiens : il s'agit, dans l'un et l'autre cas, de "parloirs" en vue
du dialogue, afin qu'une parole se fasse chair là où elle a fait défaut et là où,
donc, le symptôme a surgi. Le but est, cependant, très différent : permettre
au sujet souffrant de pouvoir à nouveau aimer et travailler est l'unique
objectif d'une analyse qui ne saurait être confondue avec la poursuite d'une
éthique, étrangère à Freud... mais peut-être un peu moins à Lacan.

Cet ouvrage expose les thèses et les méthodes de la psychanalyse susceptibles de jeter des lumières nouvelles au profit de la relation pastorale.

Des générations pionnières en la matière, celles de plusieurs théologiens
et/ou spirituels chrétiens — comme Albert Plé, Louis Beirnaert, Marc
Oraison — ont osé engager le dialogue avec la psychanalyse, aussi explosif
qu'il puisse se révéler de prime abord. Il a fallu, d'abord, mettre au point
une méthodologie du dialogue pour éviter, autant que possible, des jonctions injustifiées. Et puis, pour nombre de ces pionniers, c'est le vif de
l'expérience psychanalytique qui est apparu comme le lieu-source d'où le
matériau le plus riche sur les plans théorique et clinique peut être extrait
au bénéfice d'une pratique chrétienne de l'écoute qui n'ignore pas les ruses
de nos conflits intrapsychiques, ces ruses toutes passionnelles que la Tradition chrétienne avait déjà pressenties.

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