Médiations
Laurence Gavarini est maître de conférences à Paris-VII I au département des Sciences de l'éducation. Coauteur avec Jacques Testar« du Magasin des enfants (François Bourin, 1990) et, avec Françoise Petitot, de La Fabrique de l'enfant maltraité (Eres, 1 998).

L'enfant n'est peut-être pas plus apprécié que par le passé, mais il suscite aujourd'hui des passions. Sa venue au monde, ses premières années, sa garde, son éducation, sa sécurité, tout donne l'occasion d'exprimer des affects qui frisent rapidement la démesure. Idéalisé pourvu qu'il flatte le narcissisme parental et comble les attentes de ses éducateurs, il est aussi victime d'abus sexuels et de maltraitances dont les médias se font l'écho. Objet d'amour ou victime expiatoire ? Les affaires de pédophilie ne rendent-elles pas suspect le classique « amour des gosses », à l'origine de tant de vocations d'éducateurs ? Ce qui est sûr, c'est que les relations adultes-enfants ont changé et changeront encore.

Le phénomène contemporain de la passion de l'enfant a une histoire. Il débute avec le plaidoyer pour « une naissance sans violence » et le souci de préserver le nouveau-né des traumatismes. Il prend une autre dimension dans les années 70 et 80, lorsqu'une génération entière se veut pédagogue et vante les vertus des apprentissages précoces. Les rapports d'autorité adultes-enfants en sortent profondément modifiés. Ensuite, le développement des procréations médicalement assistées autorise un nouveau discours sur l'enfantement et la sexualité : se crée alors un véritable « mythe de la procréation postmoderne » où la biologie et la génétique jouent un rôle capital.

Au fil de ses enquêtes, Laurence Gavarini a tissé un lien original entre les phénomènes de société, les méthodes éducatives et la science médicale. Elle nous fait mesurer à quel point notre rapport à l'enfant a changé.