Couverture de la revue "Célibataire"

La Célibataire

Récompense à qui le rapportera

0N A PERDU LE SYMPTÔME. NON SA VIRULENCE, TOUJOURS ACTIVE BIEN SÛR, mais sa pensée : et la pensée du même coup puisque c'est lui qui s'avère épistémogène. où situer le symptôme aujourd'hui et comment le penser ?

Marx l'avait identifié dans le champ social, disant qu'il l'organisait en même temps qu'il l'animait d'une contre-violence révolutionnaire. Il était au centre du cercle familial avec Freud, et générateur d'une ambivalence oedipienne tyrannicide. Aujourd'hui, rien.

La mode est à la coopération sociale et le père trop blessé pour qù'on veuille encore le bousculer: on l'inciterait plutôt à refaire front, national sans doute. L'intelligence en est réduite à détricoter le langage pour vérifier que, entre les lignes, il n'y a rien. Sauf, complèterons-nous, le symptôme qu'elle ne sait plus situer ni penser.

Serait-ce en effet que plus rien ne cloche? Exclus, chômeurs, tiers-monde, sans-papiers interpellent, bien sûr, le fonctionnement social. Mais non plus le rapport conflictuel entre partenaires, seulement le fait qu'il y en ait qui soient écartés du privilège de se faire exploiter. Certains voudraient que ce soit le chômeur qui maintenant active le moteur rusé de l'histoire et porte l'espoir d'un avènement de l'Esprit.

Mais les aspirations de l'exclu sont plus individuelles que collectives et ses idéaux identiques à ceux des nantis. C'est en effet la même petite balle ronde qui fait courir et se disputer le village planétaire. Venu au secours d'un Dieu universel faiblard, l'objet cause du désir (baptisé par Lacan objet (a) réalise enfin la communauté qu'il a manquée. Les différences de langue, race, religion, histoire et même sexe s'effacent dans la joyeuse compétition mondiale.

L'image s'impose comme grand moyen général de communication à des individus rendus analphabètes par l'incapacité de déchiffrer les messages véhiculés et qu'elle expose donc à les subir de plein fouet. Homme et femme seraient enfin à parfaite égalité dans l'expression du désir si elle n'investissait plus que lui la virilité (quelle incroyable erreur de management de n'avoir pas prévu des équipes mixtes de football ! Pas un terrien qui n'eût été scotché par l'écran de la Coupe du Monde).

L'utopie fut naguère religieuse puis politique ; elle est aujourd'hui technique. Nous attendons de la science la maîtrise des êtres et des choses, la plénitude des satisfactions ; le sexe n'a qu'à bien se tenir.

La psychanalyse est seule à montrer que l'insatisfaction est constitutive du rapport au monde du parlêtre, et ce pour des raisons qui ne sont pas contingentes; religieuse ni politique, culturelle ni familiale, mais qui tiennent à la physique du langage. L'enjeu est, encore une fois, d'essayer de nous défendre contre la tentation totalitariste.

La célibataire a pour singularité de ne pas faire de sa jouissance le bouchon chargé de faire oublier le symptôme, c'est-à-dire ce qui cloche ; mais une fois qu'elle l'a restitué et en a précisé la physique, puisse-t-elle s'engager avec le partenaire dans la recherche - serait-t-elle vaine - de meilleurs remèdes.

La Célibataire
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