Les arguments du colloque :" Du Séminaire aux séminaires.Lacan entre voix et écrit"

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Pages

Samedi Matin :

1e Partie : question de méthode


Laurent Le Vaguerèse
 : Ouverture « Non sans humour»


Jean Allouch : «  Sur les transcriptions des séminaires   et conférences de Lacan . Impasses »

État des lieux 2005

Lacan a ostensiblement rendu hommage aux diverses transcriptions de son séminaire, ceci quels qu'en soient la manière et le résultat. On ne peut qu'en conclure que son approbation de chaque transcription fut indépendante de sa qualité, qu'elle est donc sans portée quant à l'appréciation de la valeur de chacune.

Les transcriptions éditées au Seuil sont le fait d'un coauteur. Ce biais ayant été élu par Jacques Lacan et Jacques-Alain Miller l'on ne voit pas que quiconque puisse objecter quoi que ce soit. Reste une question : comment cette position de coauteur oriente-t-elle le travail ?

Par ailleurs, un certain nombre de transcriptions ont été proposées ici et là depuis vingt ans, qui circulent désormais librement. Cependant, nulle part n'a été établi l'ensemble des séminaires d'une façon critique. Il n'est en outre pas du tout acquis qu'une unique manière critique puisse convenir à l'ensemble des séminaires. Clairement, les derniers font, à cet égard, difficulté.

oral / écrit

L'exercice était oral (« théâtral », dit Philippe Sollers), moyennant quoi le passage à l'écrit ne peut, à l'occasion, que trahir cette oralité. C'est notamment le cas lorsque l'écrit contraint à trancher une équivoque signifiante : ainsi l'otre qui, parfois, ne peut s'écrire ni « Autre » ni « autre ». Ou encore… sinthome ? symptôme ? saint homme ? On entrevoit, de là, deux choses : que les choix de transcription sont des choix théoriques ; mais aussi qu'on transcrit avec la théorie que l'on s'est forgée, laquelle n'est pas nécessairement fondée en raison. Conjoindre ces deux traits laisse voir qu'il y a cercle.

Mais le caractère oral de la performance ne saurait faire négliger que Lacan lisait avec de l'écrit, ceci jusqu'à Joyce, lu avec le borroméen. La doctrine se faisait localement dupe de l'écrit même qu'elle produisait. Or, concernant cette manière de lire, les élèves, pour la plupart, n'ont pas suivi. Problème : si notre rapport au jeu de l'oral et de l'écrit n'est pas celui de Lacan, il n'apparaît plus si étonnant que le projet d'une transcription critique soit resté en l'air. Tout se passe comme si l'on tentait de manger un potage avec une fourchette.

Annonce

Il s'agira de faire d'une pierre deux coups : montrer que la lecture de Lacan ne saurait se passer d'une loupe et indiquer, du même pas, que les problèmes de transcription sont des problèmes éminemment théoriques. Je m'en remettrai à quelques exemples repris de mon séminaire consacré à mettre au jour ce que j'appelle l'amour Lacan.


Catherine Holl, Paule Pérez, Bernard Roland, Marc Ruellan

scartelement, sur son chemin pavé de fleurs

« nous proposons une intervention de notre cartel de transcription qui travaille depuis plusieurs années sur la transcription de l'identification:

-Le travail de transcription en cartel:

  Cartel ou groupe éditorial, la question du plus un, la temporalité.

-Au pied du mur de la lecture:

  La méthode de travail ( conventions, appareil diacritique, taper lire décider...), la ponctuation, le signifiant et la lettre, de l'écoute à la lecture. »


Adrian Ortiz

Ouverture et inconsistance dans les séminaires de

Jacques Lacan

L'un des problèmes posés par le discours analytique est son inconsistance partielle, ponctuelle. Il semble que ce problème soit aggravé par la transmission orale, comme c'est le cas pour les séminaires de Jacques Lacan. Nous nous proposons de trouver et de construire des réponses à ces inconsistances.

Nous analyserons particulièrement deux exemples:

Premièrement dans le séminaire « Les psychoses et les structures freudiennes », la séance du 06/06/1956. Nous travaillerons à partir de trois versions du Séminaire, la version sténographique (VE), la version établie par Jacques-Alain Miller pour le Seuil et Paidos, et la version de la ALI (VALI), Association Lacanienne Internationale. Deuxièment le séminaire "Encore", spécialement la séance du 15/05/1973, prenant au moins deux versions, la version du Seuil et la sténographie.

Lacan a signalé dans l'ouverture du séminaire du 15/05/1973 (VE): “...ce que je vous énonce ne peut toujours que rester jusqu'à un certain point ouvert, ce n'est pas mon privilège, les choses chaque année restent ouvertes sur un certain nombre de points en suspens. Ça sera d'ailleurs ce sur quoi aujourd'hui j'aurai amplement à m'étendre”.

L'un des aspects par lequel on peut mettre à preuve la qualité d'un ètablissement d'un séminaire de Jacques Lacan c'est le mode par lequel les différentes versions traitent et présentent ces points d'une mode qui permet de les mantenir ouverts et en suspens ou les détourner vers l'inconsistance logique et discursive.

Patrick Valas : Existe-t-il une spécificité dans la transcription des séminaires de Lacan ? : peut-on en déduire des règles propres a la transmission et a l'enseignement de la psychanalyse ? une question de style.

 

Samedi après-midi

Encore par exemple


E.Porge : « La trace de la publication du livre 11 dans « Encore »

Passage de l'écrit dans l'oral

La notion de transcription doit pouvoir être interprétée en fonction de ce qu'elle a représenté pour Lacan.

Dans ce but, je m'arrêterai sur le moment où la première transcription d'un séminaire de Lacan, en l'occurrence Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse (Ou Fondements de la psychanalyse) a été publié, soit début 1973. Ce moment est significatif et éclaire la notion de transcription. C'est après l'introduction du terme mathème (1971) et après L'étourdit (1972). C'est pendant le séminaire Encore (1972-1973).

Ce séminaire porte les traces de cette première publication d'une transcription, jusque dans une référence à la hâte, à laquelle se noue précisément un problème de transcription.

Je fais l'hypothèse que l'acte de publication d'une transcription de séminaire se soutient de la théorie de l'écriture comme effet de discours que Lacan présente dans ce séminaire Encore, en même temps que cet acte contribue à donner consistance à cette théorie.

La transcription ne serait donc pas à concevoir comme un passage de l'oral à l'écrit mais un passage de l'écrit dans l'oral vers l'oral.


Serge Hajhblum : « le passage à l'écriture. » associé à Monique Chollet et Michel Roussan

Contrairement à Freud, Lacan a très peu écrit. Revenant aux principes même de la psychanalyse, c'est à haute voix qu'il a soutenu et poursuivi toute son élaboration. C'est ainsi qu'il peut dire la tenue de son séminaire comme travail d'analysant, d'analysant du ne pas vouloir en savoir précise-t-il dans Encore.

Écrire, transcrire toutes ces séances de séminaires, c'est se situer au point où la voix (deux fois) perdue aurait entraîné le dire même dans sa perte, et essayer de (re)trouver le dire disparu (avec une voix revenue ?).

 

Le choix du séminaire Encore, tenu en 1972-1973, comme point de rebroussement de la question générale de la transcription se tient ainsi :

-         Ce séminaire a été publié du vivant de Lacan qui l'a relu, malgré la peur et le tremblement que toute relecture lui suscite : « A relire la première transcription de ce Séminaire…» 26-06-1973, ed. du Seuil : « A le relire, j'ai trouvé que c'était pas si mal… » 26-06-1973, Transcription diffusée entre autres par l'ELP.

-          Cette transcription est différente d'autres, que j'appelle corsaires, parce que diffusées avec son assentiment, et réalisées sur la base des enregistrements sonores, d'archives et des diverses notes : par exemple celles diffusées par Monique Chollet, ou par le groupe de P. Guyomard, Lucien et Marie-Claire Kokh, P; P. Soury, et G. Taillandier.

-         Cette transcription, approuvée et signée J. Lacan, diffère très sensiblement des enregistrements audiophoniques tels qu'on peut les entendre aujourd'hui.

-         Ce qui pose problèmes :

            1°) il y a un texte de Lacan qui n'est jamais effectif dans quelque transcription que ce soit. Chaque transcription le suppose, s'y réfère et l'indique en tant que nécessaire : aucune ne le réalise

            2°) Aussi loin qu'on aille dans la mise au jour ou l'exhumation des archives, notes, et documents divers… le problème de la référence ne cesse de se (re)poser : au point qu'il est possible de soutenir qu'une transcription ne vaut pas plus qu'une autre, et seuls comptent les écarts entre l'une et l'autre, écarts répercutés au sein même de chaque nouvelle transcription.

            3°) C'est là le point où l'enseignement rejoint la transmission analytique : ce manquement qui insiste d'autant plus que la transcription  se fait plus complète, plus référencée.

            4°) Les séminaires sont perdus. Ce qui situe la transcription dans le champ qu'on peut appeler à la suite des chercheurs en génétique littéraire, du procès de la génétique de la transcription : les diverses états d'un manuscrit aboutissant à un état à la fois terminé et interminable du texte

            5°) où ce  qui importerait notamment serait le déploiement répété de l'écart entre les transcriptions qui répète l'écart avec le texte supposé après-coup premier de l'enseignement de Lacan .

 

Le passage à l'écriture, plus généralement le passage à la consignation des séminaires de Lacan, fait question : le Séminaire Encore en est un exemple princeps.

 

René Lew : "Rien de plus compact qu'une

faille": du rivage des sexes au littoral de l'écrit.

 « …j'entends, comme je l'ai dit hier, la transcription du séminaire de Lacan comme un travail en avant, non qu'il s'agisse pour moi d'établir « ce que Lacan a vraiment dit » (cependant il s'agit quand même de coller aux enregistrements, sténotypie et bandes magnétiques audio), mais d'assurer ce qui devient un « texte » de Lacan (pas un « écrit ») en allant au-delà. Si on ne prolonge pas Lacan, à mon avis, on ne l'assure pas. Sur le texte de toute transcription, y compris l'officielle, j'ai déjà mentionné l'ironie de Lacan (en postface au texte établi du séminaire Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse).

J'insiste : on ne peut soutenir le propos de Lacan qu'en le travaillant.C'est donc ce que je vais faire le 26 novembre, en m'appuyant sur

- le discours de Lacan du 21 novembre 1972, selon la sténotypie,

- l'établissement de l'édition du Seuil (pp. 13-15 d'Encore),

sous l'intitulé « Rien de plus compact qu'une faille ».

Cela concernera bien entendu des questions d'écriture, mais aussi de sexuation, jouissance, logique des discours, modes de mise en place des syntaxes et des prédicats. Je m'appuierai sur le mode de conjonction du savoir et du non-su que prône Nelson Goodman, et dont à mon sens la psychanalyse se fonde. Chez Lacan cela s'appelle « asphéricité ». C'est choisir un mode de discours fondé aussi sur la logique féminine (indécidabilité entre impossibilité et contingence) plutôt que sur la logique canonique classique en tant que masculine (« contien » de l'universel par l'existentiel, entre possibilité et nécessité).

Cartel Franco-espagnol de transcription : E.Porge , Rodrigo Toscano, Cristina Fontana, María José de la Viña, Graciela Strada. "A propos de la transcription du séminaire "Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse" ou "Les fondements de la psychanalyse".

Nous nous proposons de montrer à partir des exemples précis pris dans les séances des 10 et 17 juin 1964 du séminaire appelé par lui Les fondements de la psychanalyse, et, par la suite, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, des variantes dans la transcription. Variantes qu'on dirait seulement de détail, mais qui peuvent révéler et de façon assez systématique et pourquoi pas, symptômatique, donc conséquente, ce que nous pouvons faire de la transcription du séminaire.

D'autre part, la partie du monde la plus sensible à cet enseignement, en dehors de celui de langue française, continue à être l'univers hispanophone tant en Amérique latine qu'en Espagne. Par rapport à ce même séminaire, fait exceptionnel, nous avons deux traductions publiées à partir de la version du Seuil : a) celle de Francisco Monge (Barral eds.) parue en 1977 et b) celle de l'équipe « officielle » des traducteurs du séminaire : J. L. Delmont-Mauri et J. Sucre, responsables de la seule édition autorisée --comme ils le disent en espagnol sur la page de garde (p. 6)--, «la única edición autorizada ».

Et voici un petit, mais significatif et peut-être unique, problème, valable et illustratif de ce que nous avançons : cette traduction, « seule édition autorisée donc» est faite à partir de quel texte ? Nous lisons et toujours à la p. 6 que le libro 11, Los cuatro conceptos fundamentales del psicoanálisis, a été traduit d'un ouvrage (paru à Paris aux ed. du Seuil en 1973), dont le titre original, serait Les quatre principes fondamentaux de la psychanalyse, 1964.
.

Dimanche Matin 

3 e Partie La voix/l'écrit


Olivier Grignon

L'idée majeure qui se dégage, c'est presque l'inétablissable du Séminaire : pas seulement parce qu'il n'y aurait pas d'appareil critique unique, mais plutôt parce qu'il en faudrait un.

Autrement dit, parce que c'est forcement un travail de lecture ( c'est-à-dire d'analyse…). Je ferai déjà remarquer que ça n'est pas spécifique à l'œuvre de Lacan, c'est la cas pour n'importe quelle œuvre écrite un peu consistante.

La transcription d'une œuvre orale est un travail de lecture qui pose des problèmes supplémentaires. L'œuvre de Lacan est essentiellement orale, et il est clair qu'il l'a voulue ainsi pour quelle soit l'œuvre d'un analysant ou d'un passant ; donc œuvre singulière,portée par sa voix, habitée corporellement et fondée sur l'expérience d'une vie et d'une pratique analytique. Beaucoup de « lacaniens » ne s'en remettent pas et sont animés d'une rage de la rabattre sur l'écrit ; comme si l'on pouvait croire sans partage aux ambiguïtés de Lacan affirmant aux sud-américains qu'ils étaient en position d'élèves favorisés puisque absents de son Séminaire : l'homme – Lacan ne s'interposant donc plus à son enseignement. Y croire sans réserve me semble une absurdité contraire à son enseignement lui-même, cela recouvre sans doute des divergences sous-jacentes, théoriques et pratiques – quant au transfert notamment.

Pour moi, la question de la transcription pose des problèmes bien différents de ceux de la traduction, parce qu'elle confronte directement à la spécificité de l'enseignement de Lacan, qui est un enseignement psychanalytique de la psychanalyse – avec ses errements, sa mise en scène incarnée, et surtout cette volonté acharnée de miner, de subvertir, ce qui est établi. Y compris ce qu'il a lui-même avancé…

Reste que le Séminaire doit être établi textuellement.

(…) On pourrait s'orienter vers un colloque posant tous les problèmes liés à la transcription ( de tous ordres : pratiques et théoriques, y compris le problème des archives) en s'appuyant spécifiquement sur le séminaire Encore afin d'étayer les débats sur des éléments concrets en mémoire pour tous les participants.

Jean-Paul Gilson : Encore: un traité sur le j'ouis-dire

 

Lacan s'est plaint d'être mal lu, il s'est plaint de ce que sa passe soit un échec, il s'est plaint aussi de ce que sa topologie rebute.

Nous l'avons entendu au séminaire. Pour ma part un peu après Encore. Sa voix, son allant et sa présence forçaient l'adhésion et tout bien pesé, il gagnait immédiatement ce que Freud mettait plus de temps à obtenir : une conviction intime. Ceci nous mena à une dissolution d'où surgirent ces plaintes susdites.

Il nous a fallu relire les textes, le séminaire, d'abord dans les diverses versions cursives, puis dans la version officielle. Refaire alors le travail théorique, critique et rigoureux de lecture  et d'extraction, de sa topologie par ex.

Une contre analyse en quelque sorte, remettre in statu quo ante ce que le transfert de travail avait enveloppé de sa membrane discursive et symbolique. Aujourd'hui nous voici à pied d'œuvre, relire Encore, le petit vingtième pour les tintinophiles, le double XX pour d'autres. Allons-nous réussir à faire en sorte que ce qui s'en exhume, posthume, et se réalise enfin cette passe qu'il attendait de ses élèves, un dire qui rejoigne la croisade qu'il mena contre le post freudisme, une avancée qui débordait l'innovation freudienne même.

Rien moins que le premier traité sur la jouissance dont je rappelle les définitions glanées quinze ans avant et laissées sur le champ, éteules ramassées, par chance dans des versions apocryphes, quelques années après sa mort.

« plaisir de la surprise, surprise du plaisir »

ou cette autre

« l'espèce d'irradiation ou de phosphorescence qui se dégage du fait que le sujet se trouve dans une position venue d'on ne sait quelle béance primitive en quelque sorte extraite de son rapport d'implication à l'objet, et de là, il se saisit fondamentalement lui-même comme patient dans cette relation »

Nous y ajouterons encore « Encore », redoublement du dire dans l'écrit et retour dans l'interrogation de la transcription. Codages dont il nous faut extraire l'objet renouvelé de ce « traité »

JP Gilson

 

Jacques Nassif : « La voix de Lacan, ce qu'elle nous dit aujourd'hui »

Mon dernier livre : L'écrit la voix (Aubier 2004) tente de lever un refoulement. Il porte sur un fait resté paradoxalement inaperçu. C'est bien avec leur voix que l'analysant et l'analyste travaillent pour mettre en route une cure. Or ses effets ne pourraient s'expliquer si n'étaient prises en compte que les simples coordonnées de la parole (Freud) et du langage (Lacan).

C'est donc pour m'être situé en un troisième temps, après ces deux grandes gestes théoriques, que cette tâche a pu être menée à bien, troisième temps dont cette conférence voudrait faire la théorie.

Nous vivons à une époque où ce n'est plus seulement par la plume et l'édition de textes que peut être tentée une transmission de la psychanalyse : ce fut électivement le choix de Freud, ou son symptôme. Nous en sommes à présent avertis : ce ne peut plus être seulement par la voix et l'élection de la voie du séminaire oral que cette tâche peut être menée à bien. Elle aboutit aussi sûrement que le dogme bureaucratique à une vulgate obscurantiste.

J'interrogerai plus particulièrement à ce propos le symptôme sur lequel a pu se greffer une certaine décision : celle de ne plus reprendre dans l'écrit les enseignements d'un séminaire pour s'en dire l'auteur, mais de laisser à la diffusion sous le manteau de transcriptions vaille que vaille le soin de diffuser cet enseignement, en multipliant l'illégitimité, pour mieux assurer en fin de course la légitimité du seul transcripteur autorisé.

Faire la théorie du troisième temps où nous nous trouvons, c'est tenter à présent d'ajointer la voix avec l'écrit, sous la forme d'une théorie de la lecture qui fonde la nécessité d'une séparation de l'institution analytique pour qu'elle se distingue, tant de l'Université que des lieux où s'exerce le Pouvoir, cette lecture ne pouvant se déployer que dans une situation de voix, éphémère comme la représentation théâtrale, et performative, comme ces institutions où la parole est censée faire acte.

Si cette théorie de la lecture doit assumer tous les paradoxes de ce que signifie une lecture de la voix en tant que telle, c'est bien pour rendre compte de ce qui se passe au sein d'une cure où il ne suffit plus de se priver d'écrire pour parler ni d'interdire de lire pour savoir, mais où il y a lieu de pratiquer une sorte de « diagonalisation », capable d'assurer le comptage exhaustif des effets de la parole, en vérifiant son efficace tour à tour dans la lecture des textes et dans l'écoute des témoignages de la vie.

Or c'est bien là tout un aspect du style de pratique de l'analyse promue par Lacan, moins à travers les oukases de son Église ou la lecture souvent difficile de ses écrits (ou maintenant de ses audios), qu'au travers de la transmission de ce style par certains de ses analysants qui, pour être devenus analystes, n'ont pas oublié la leçon de liberté de cette voix, elle qui savait fort bien à quel point elle pouvait hypnotiser les foules, à son séminaire, et qui s'est donc plutôt employée, à son cabinet, à faire en sorte que l'on se réveille !

Dimanche après-midi

4e Partie : le débat


François Leguil,"Le séminaire, ou Lacan en mouvement.
"

Herbert Wachsberger, « Incidence sur la lecture du Séminaire de références faites par Lacan au cours de son enseignement à certains écrits (autres que les siens). Exemple sera pris d'un ouvrage mentionné lors de son séminaire sur l'Angoisse"

J. A. Miller, "De la micrologie"

15h15-17h Débat avec la salle