Exposition Max Beckmann

Autoportrait de Beckmann

Exposition au Centre Pompidou jusq'au 3 janvier 2003

Nocturne tous les jeudis soirs jusqu'à 23h

8€50 tarif réduit - 6€50 visite commentée le jeudi à 19h

tel 01 44 78 12 57

Max Beckmann

L'exposition des œuvres de max Beckmann au Centre Pompidou est exceptionnelle. Jamais depuis les années 30 on n'avait eu à Paris l'occasion de découvrir aussi largement cette œuvre immense et splendide. Une œuvre majeure d'un artiste du vingtième siècle dont la posture est profondément actuelle et vaut pour nos "temps difficiles".

Max Beckmann a beaucoup écrit, nul ne peut dire mieux que lui l'ambition et l'exigence de son art. Je citerai ce texte de 1920 "La ville c'est ax B de max BLavilleion "max beckmann, un peintre dans l'histoire" sur "les joueurs de Rugby art. Je citerai ce texte de 1920 "le grand orchestre humain", car il s'agit d'un véritable manifeste de son engagement d'homme, avec les moyens de la peinture. Volonté exprimée d'affirmer la figure humaine, par choix éthique et plastique. (choix quasi métaphysique du dessin, dans l'expression des formes, celui de maintenir l'humain dans son volume à une époque où (voir le tableau sur "les joueurs de rugby") , le programme annoncé c'est la guerre.

LA VILLE, C'EST LE GRAND ORCHESTRE HUMAIN

Famille (tableau de Beckmann)
(1920) La guerre s'approche de sa triste fin. Elle n'a pas changé mes idées sur la vie ; elle les a confirmées. Nous allons vers des temps difficiles. Être parmi les gens m'est encore plus nécessaire qu'avant la guerre. Notre place est dans les villes, surtout maintenant. Il nous faut participer à la grande misère à venir. Il faut exposer nos cœurs, nos nerfs aux cris de déception des gens trompés. Il faut être très près des gens. La seule justification de notre existence d'artiste, passablement superflue et égoïste, est de présenter aux gens une image de leur destin. Cela n'est possible que si ont les aime.

Au fond, il est inutile d'aimer les hommes, cet amas d'égoïsme dont nous faisons partie ; mais je le ferai quand même. Je les aime dans toute leur mesquinerie et banalité, leur stupidité, leur autosatisfaction facile, leur héroïsme hélas ! si rare. Tous les jours, tout homme est nouveau pour moi comme s'il venait de tomber du ciel. Où sentir ça plus fortement que dans les villes ? La ville, c'est le grand orchestre. Si j'aime tellement la peinture c'est, je pense, parce qu'elle m'oblige à être objectif

Je ne hais rien autant que la sentimentalité. Notre existence ébranlée me brûle. Plus est forte ma décision de fixer les choses indicibles de la vie, plus je serre les lèvres, tout à ma volonté froide de saisir cette monstrueuse et palpitante vitalité, de la supprimer et l'étrangler, de l'emprisonner dans des lignes et des plans aussi nets comme du verre.

Société parisienne (tableau de Beckmann)
Je ne pleure pas, je déteste les larmes, signes d'esclavage. Je ne pense qu'aux objets : à une jambe, un bras, au sentiment merveilleux d'ouvrir la surface du tableau par des raccourcis, d'organiser l'espace pictural. Je pense aux relations entre lignes droites et figues courbes, à la combinaison amusante des petites formes arrondies, souvent à plusieurs jambes, avec les surfaces planes des pans de mur, je pense à la profondeur des tables, des croisées et des façades.

Quittons l'imitation stérile du visible, le décoratif décadent, le mysticisme ampoulé et faux, dans l'espoir d'arriver à une objectivité transcendante qui témoigne de notre profond amour pour la nature et pour les hommes, comme en témoignent Màleskircher, Grunenwald, Bruegel, Cézanne et Van Gogh.

J'espère devenir toujours plus simple, plus concentré dans mon expression. Mais je sais que je n'abandonnerai jamais les volumes pleins. Pas d'arabesques, pas de calligraphie, mais la plénitude, le sculptural.

(extrait de "Scôpferische Konfession " Berlin, 1920, publié dans Je catalogue de l'exposition Paris-Berlin, Paris, Musée National d'Art Moderne, 1978).

Anne Gorouben-Laville