Épitres

Quelle est l’implication du psychanalyste dans le traitement psychique ? La métaphore freudienne des premiers temps de la psychanalyse – le miroir impassible – ne suffit plus à en rendre compte. La cure psychanalytique ne peut se réduire à une rhétorique ou à l’application d’une théorie, ni l’interprétation à une traduction.

L’attention flottante et la neutralité, loin de protéger le psychanalyste, l’exposent et le proposent à l’analysant selon des modalités de transformation de son être psychique dont la complexité est loin d’avoir été explorée dans toutes ses conséquences. La spécificité et l’éventuelle force mutative de la psychanalyse résident essentiellement dans la qualité de ce travail intrapsychique et intersubjectif qui, par le biais des affects et des émotions, implique aussi le corps. Là réside l’ombilic de la psychanalyse qui la relie à l’inconnu, à partir duquel la théorie peut se renouveler et s’approfondir. D’où la nécessité pour le psychanalyste de l’oublier et de s’oublier lui-même suffisamment le temps de la séance.

Ce livre souligne l’importance dans la pratique quotidienne de l’analyse des la théorie des pulsions de Freud et de sa conception d’un Moi qui est d’abord et avant tout un Moi corporel. Patient et analyste perlaborent leurs Moi corporels dans la cure de parole.

Il propose également une mise en perspective critique nouvelle des rapports entre la théorie et la pratique de Lacan, à partir du constat que c’est précisément ce Moi corporel qui en a été effacé. La pratique des séances courtes et à durée variable peut être envisagée de ce point de vue, c’est à dire d’une cohérence entre théorie et pratique, et non d’un rapport fortuit et contingent. Ces réflexions s’inscrivent dans une réflexion plus large sur la question de l’être et de la présence de l’analyste.

Ce qui est en jeu c’est la question du corps dans la théorie et l’écoute psychanalytiques.

Le thème de la transmission de la psychanalyse est un autre fil rouge de ce livre, tout particulièrement ce qui concerne les achoppements dans l’analyse du transfert négatif chez les futurs analystes, et la difficulté corollaire constituée par le déni de la haine de contre-transfert. L’avenir de l’analyse dépend d’une transmission qui ne soit pas biaisée par la mise en acte de la haine cryptique inanalysée, qui s’avère être une haine de la psychanalyse sous couvert, le plus souvent, de son idéalisation.