Essai sur le transsexualisme et l'identité personnelle

Essai sur le transsexualisme et l'identité personnelle

Être un homme ou une femme est-il naturel ou culturel ? Lidentité
sexuelle s'enracine-t-elle dans le corps, est-ce un donné physiologique, voire neurobiologique ? Ou ne s'agit-il que d'un rôle qu'on joue, qu'on pourrait intervertir avec d'autres et dont on puisse altérer le texte ?

La métamorphose transsexuelle est une voie d'accès privilégiée à ces interrogations, parce que le réel de l'identité, avant d'avoir pu dire son mot, est ici forcé par un fabuleux acte autoconstructif : si tant de magistrats, tant de psychiatres sont embarrassés par les transsexuels, si leur affaire est à la pointe avancée de la bioéthique, de la critique de la culture ou de la protestation libertaire, c'est justement parce qu'ils assument leur identité comme une « construction sociale ». Dans la sphère éthérée des débats savants, ils font sentir l'urgence d'une affaire de vie ou de mort, en un court-circuit inattendu entre une question de catégorisation et une atteinte directe à la chair.

Le problème est, pour le dire d'un mot, métaphysique. Il vise le noeud obscur qui attache ce corps à ce je ; il oblige donc à dévoiler quelle nature humaine il faut, à un moment ou à un autre, nous supposer. Et il est à peine besoin de l'approfondir pour que la philosophie, la psychanalyse, mais aussi la médecine, la sociologie, le droit- toutes disciplines aspirant à sauver leur rationalité, voire leur scientificité, face à ce qui paraît la déraison même, « changer de sexe » - en ressortent ébranlés.

Telle est la crise des certitudes qui motive cet essai.